La vente de 36 Rafale à l'Inde s'enlise à son tour

Par latribune.fr  |   |  632  mots
Après le "contrat du siècle" annulé par l'Inde, l'autre projet de livraison de 36 Rafale par Dassault semble à son tour compromis.
Le contrat portant sur la vente de 36 Rafale entre Dassault Aviation et l'Inde achoppe sur des divergences liées au prix unitaire de l'appareil et sur la volonté de Delhi d'obtenir pour ce contrat des "offsets" (investissements sur place de la valeur d'une partie du contrat).

La vente de Rafale en Inde a de nouveau du plomb dans l'aile. Après l'annonce du gouvernement indien de casser l'appel d'offres qui devait offrir à Dassault le "contrat du siècle" (126 Rafale dont 108 construits en Inde), le pays est désormais en désaccord avec l'industriel français sur le projet de vente de 36 avions de combat de Dassault Aviation. Pourtant, en avril dernier, le Premier ministre indien, Narendra Modi, avait annoncé que ce contrat devait être réalisé "sur étagère", c'est-à-dire que les avions seraient construits en France, pour être livrés le plus rapidement possible.

Des négociations qui devaient être bouclées en "un mois ou deux"...

Mais, selon deux sources (des responsables du secteur indien de la défense) citées par Reuters, les deux parties sont désormais en désaccord sur le prix unitaire des avions et sur la volonté de l'Inde d'obtenir pour ce contrat-là aussi (cf. celui des 126 Rafale, aujourd'hui caduc), des "offsets" (une partie de la valeur du contrat devra être transformée en investissements et emplois sur place, en Inde).

Le 16 mai, le ministre indien de la Défense, Manohar Parrikar, avait déclaré que les négociations sur le prix du contrat seraient bouclées en "un mois ou deux". Mais les discussions ont achoppé sur l'insistance de l'Inde à obtenir ses Rafale à un prix inférieur aux quelque 200 millions de dollars (180 millions d'euros) l'unité, prix qui avait servi de base aux négociations antérieures avec Dassault Aviation, ont déclaré les deux responsables militaires.

"Puisqu'il n'y a pas de transferts de technologies, le prix qui était sur la table pendant les négociations commerciales n'a plus lieu d'être", a déclaré l'un des responsables, tenu au courant des nouvelles négociations.

En effet, contrairement au précédent contrat, celui des 126 Rafale, issu d'un appel d'offres très disputé et remporté par Dassault Aviation -avant qu'il ne soit cassé-, cette commande de 36 aéronefs ne prévoit pas de production en Inde, pour ne pas retarder la livraison.

Débat sur les "offsets"

Les deux responsables indiens ont également indiqué que les discussions achoppaient aussi sur la condition posée par New Delhi en vertu de laquelle les fabricants d'armes doivent investir sur place une partie de la valeur de tout contrat supérieur à 50 millions de dollars (45 millions d'euros), une forme de transfert compensatoire désigné couramment par le terme "offset".

Ces pratiques d'offsets sont monnaie courante dans les contrats d'armement avec les pays émergents, où, pour décrocher des commandes, les groupes de défense occidentaux doivent investir en technologies et en emplois.

Dans ce cas précis, ont précisé les deux responsables, l'Inde veut que Dassault Aviation investisse au moins 30% de la valeur du contrat par le biais notamment de l'achat de composants pour sa production en France, mais aussi par l'installation d'usines en Inde et par de la formation aux emplois de haute technologie.

   | A lire : Défense, le quitte ou double des transferts de technologies

La France s'est dite prête à satisfaire les demandes d'offsets mais a souligné qu'il lui faudrait du temps pour mettre en place un réseau de distribution en Inde pour ses composants, par exemple, renchérissant le coût du contrat, a déclaré l'un des responsables.

L'Inde, confrontée à la montée en puissance militaire de la Chine et du Pakistan, accuse 19 années de retard dans son programme national de construction d'avions de combat légers, la certification finale du premier avion n'étant prévue que pour mars 2016.

Car, en dépit de sa volonté de fabriquer localement, l'Inde peine à développer ses propres programmes.

   | Lire : "Make in India" : quand New Delhi ne joue pas vraiment le jeu (fév. 2015)

 (Avec Reuters)