La banque du futur, un savant mélange de digital et d’humain

Pour le Boston Consulting Group, la banque de demain doit être "bionique" et non un "pure player" de la banque en ligne. En devenant "bioniques", les banques pourraient améliorer leur rentabilité des capitaux propres de 8 à 10 points, estime le cabinet.
Christine Lejoux
Pas moins du quart des interactions entre les banques et leurs clients se font désormais via le mobile, et principalement le smartphone, selon deux études du BCG.

Après la main, l'œil, le pancréas bioniques, la banque bionique ? C'est en tout cas la vision qu'a le BCG (Boston Consulting Group) de la banque du futur, qui, selon le cabinet de conseil en stratégie, ne sera bien évidemment plus la banque "à la papa", avec passage obligé en agence pour un oui ou pour un non, mais qui ne sera pas davantage calquée sur le modèle des "pure players" de la banque en ligne. Ces derniers "ne représenteront sans doute qu'une faible partie du marché, en termes de PNB [produit net bancaire, l'équivalent du chiffre d'affaires ; Ndlr]. La banque du futur ne sera pas une banque désincarnée, accessible dans le cloud uniquement", affirme Axel Reinaud, directeur associé senior au BCG.

Pour le cabinet, les banques devront en réalité devenir bioniques, c'est-à-dire offrir le mélange adéquat entre technologies numériques et contact humain, afin de s'adapter à la révolution digitale, qui n'épargne aucun secteur d'activité, et surtout pas l'industrie bancaire. De fait, pas moins du quart des interactions entre les banques et leurs clients se font désormais via le mobile, et principalement le smartphone, selon deux études du BCG, menées auprès de 40 institutions financières et de 15 des plus grandes banques de détail au monde.

Une concurrence croissante des fintech et des géants du Web

Conséquence, dans nombre de marchés matures, les opérations bancaires effectuées en agence ont diminué de 3% par an, en moyenne, de 2004 à 2012. Face à cette mutation de la relation bancaire et à la montée en puissance de concurrents issus du Web ou spécialisés dans les technologies financières - les fameuses startups "fintech" -, les banques planchent toutes sur des stratégies de transformation digitale. Des stratégies qui, de façon générale et comme le proclame plus précisément le groupe BPCE (Banque Populaire Caisse d'Epargne), visent à allier "le meilleur du digital et le meilleur de l'humain."

Mais, jusqu'à présent, dans le cadre de leurs stratégies de transformation numérique, la plupart des établissements bancaires ont scindé leurs activités en deux grandes catégories. Avec, d'un côté, les opérations suffisamment basiques pour être réalisées par les clients eux-mêmes via les canaux digitaux, comme la consultation de leurs comptes ou le passage d'ordres de virements. Et, de l'autre côté, les opérations dites complexes, telles que la souscription d'un crédit immobilier ou la préparation de la retraite, qui nécessitent de consulter un conseiller bancaire.

Un coût par client inférieur de 29% aux concurrents

Pour le BCG, le mélange entre banque digitale et banque « humaine » doit être plus subtil.

"Le digital va permettre d'aller plus loin dans l'amélioration de l'expérience client, tant pour les produits et services simples que pour les plus complexes. L'idée de la banque bionique est d'investir dans l'humain lorsque cela est nécessaire (entrée en relation, conseil à valeur ajoutée, SAV (service après-vente), évènements de la vie) et d'offrir des outils digitaux au client pour le reste (transactions simples mais également simulateurs, constitution de dossiers, gestion des contrats, etc.)",

indique Axel Reinaud. Autrement dit, même au sein d'une opération aussi sophistiquée que la souscription d'un crédit immobilier, certaines étapes peuvent être digitalisées, afin de permettre au banquier de se consacrer sur son cœur de métier, à savoir le conseil au client.

Un conseil qui n'occupe souvent qu'une partie modeste d'un rendez-vous consacré à un crédit immobilier, le chargé de clientèle devant effectuer de nombreuses autres tâches, comme la simulation de prêt. Or cette simulation, le client peut fort bien l'effectuer lui-même via Internet, ce qui permet de gagner du temps lors du rendez-vous avec son conseiller. Tout comme il peut scanner lui-même les pièces justificatives demandées dans le cadre de ce prêt, et les adresser par courriel à sa banque, ce qui réduira les coûts de back-office de cette dernière. Selon le BCG, les banques en pointe dans le digital ont un coût par client inférieur de 29% à celui de concurrentes moins avancées dans leur transformation numérique. Et, en devenant "bioniques", les banques pourraient améliorer leur rentabilité des capitaux propres de 8 à 10 points, estime le cabinet.

baisse de la satisfaction des clients

Mais si davantage de tâches incombent au client, quid de l'évolution des effectifs des agences bancaires ?

"La baisse importante de la charge de travail dans les agences, qui résultera des gains de productivité liés au digital, ne signifie pas que les effectifs diminueront dans les mêmes proportions. Le temps de travail ainsi libéré pourrait, au moins en partie, être réaffecté à la relation-client",

nuance Axel Reinaud. Ce qui ne sera pas du luxe, le taux de satisfaction des clients des banques de détail ayant fléchi de 1% environ partout dans le monde en 2014, pour la deuxième année consécutive, d'après le World Retail Banking Report publié par Capgemini et l'Efma. Un mécontentement qui provient notamment du fait que les clients ne retrouvent pas chez les banques l'instantanéité et la qualité de service auxquels les ont accoutumés Amazon et autres grands noms de l'Internet.

Une dizaine d'années avant l'émergence de banques bioniques

"La banque traditionnelle était construite autour des produits et des canaux permettant de commercialiser ces produits. La banque du futur est structurée autour des clients et des données relatives à ces derniers. La bataille pour la banque du futur se fera autour de la capacité à gérer ces masses très importantes de données avec des technologies big data [traitement et analyse d'énormes masses de données ; Ndlr]",

prévient Axel Reinaud. Un travail de titan en perspective pour des banques qui doivent composer avec l'héritage de systèmes informatiques datant des années 1970, sur lesquels il convient de greffer des outils de gestion des données ultra-pointus, "à la Google." Ce qui fait dire à Axel Reinaud que "la banque bionique n'apparaîtra pas du jour au lendemain, cinq à dix années seront nécessaires." A noter que la Polonaise mBank, qui permet à ses clients de souscrire un crédit via leur smartphone en quelques secondes, tout en revendiquant un réseau de 160 agences environ, semble avoir une longueur d'avance dans la course à la banque bionique.

Christine Lejoux

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Commentaires 3
à écrit le 26/05/2015 à 11:39
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La Banque ideale du future sera Collaborative, geree par la communaute (Disintermediation), ouverte, socialement responsable Financant le monde de demain..(.P2P social lendening block-chain encryption..) En bref la Banque de demain sera sans Banqu...

à écrit le 06/05/2015 à 22:17
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Chiche! Une banque qui nous garantirait le secret de nos transactions, en tout cas au sens commercial (l'état quant à lui peut faire ce qu'il veut tant qu'il s'occupe uniquement de ses prérogatives régaliennes) c'est à dire que nous serions seuls pos...

à écrit le 05/05/2015 à 12:53
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Bonjour, Il y a une erreur d'usage de terme dans cet article. Bionique veux dire adjonction de biologique et d'électronique. Par exemple un œil artificiel greffé via des électrode au cerveau est dit bionique, un cœur artificiel est dit bionique, une...

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