Préférence européenne : le nouveau plaidoyer du patron d'Airbus Safran Launchers

Par Michel Cabirol  |   |  582  mots
Ariane 6 arrive sur le marché commercial en 2017
Le président exécutif d'Airbus Safran Launchers Alain Charmeau a plaidé pour une préférence européenne en matière de services de lancement. Il a également appelé l'Europe à développer les besoins institutionnels dans le domaine spatial.

Europe, où es-tu ?, semble dire Alain Charmeau. Alors qu'Arianespace lance cette année la commercialisation du futur lanceur européen Ariane 6, le président exécutif d'Airbus Safran Launchers (ASL) est une nouvelle fois revenu à la charge lors de la présentation de ses vœux à la presse en plaidant pour une préférence européenne en matière de services de lancement. Une préférence que les autres puissances spatiales appliquent très scrupuleusement, fait-il valoir.

"Les lancements institutionnels européens ne sont pas destinés aux seuls lanceurs européens puisqu'ils sont ouverts quasiment tout le temps à la compétition. C'est donc une dissymétrie sur les marchés qui est très importante", a regretté Alain Charmeau. "Je ne demande même pas d'exclusivité, que tous les autres pays donnent à leurs industriels. Je demande d'avoir une commande qui nous permette d'avoir une visibilité pour des lancements entre 2021 et 2025", a-t-il précisé.

Sept satellites institutionnels européens par an à lancer

Que veulent les industriels européens ? Que l'Europe - Union européenne (UE), Agence spatiale européenne (ESA), Eumetsat (Organisation européenne pour l'exploitation des satellites météorologiques) et les pays membres - s'engage à faire lancer au moins cinq satellites par Ariane 6 et deux autres par Vega par an. Cela pourrait se faire dans le cadre d'une commande pluriannuelle où chacun des pays ou des organisations pourraient avoir des droits de tirage.

C'est "un enjeu majeur pour garantir la pérennité d'un accès autonome à l'espace pour l'Europe et de la compétitivité de la filière spatiale", a estimé le président exécutif d'ASL. Notamment avec l'arrivée cette année sur le marché commercial d'Ariane 6, dont le premier vol est prévu en 2020. En 2013, il faut se souvenir que le ministère de la Défense allemand avait confié, avec la complicité des constructeurs de satellites Airbus et OHB, le lancement de trois satellites identiques d'observation gouvernementaux au lanceur américain Falcon 9 de SpaceX.

Développer les besoins institutionnels

Alain Charmeau a également plaidé pour que l'Europe développe "absolument" des "lancements pour des besoins institutionnels". Il a souhaité que "l'Europe s'aligne sur les autres pays du monde en ce qui concerne l'utilisation de lanceurs européens pour les besoins européens". Selon ASL, les trois-quarts (65) des 86 lancements de satellites opérés dans le monde en 2016 étaient des lancements institutionnels, donc réservés à des lanceurs nationaux: 65% aux États-Unis (sur 22 lancements en 2016), 100% en Chine (22), 76% en Russie (18) et 85% dans les autres puissances spatiale (13), principalement en Inde (7) et au Japon (4).

"L'Europe dans ce panorama détonne de façon significative puisque seulement un quart des lancements réalisés par des lanceurs européens sont pour des lancements institutionnels", a relevé le patron d'ASL.

La filière européenne reste pourtant leader sur le marché commercial avec 38% des tirs réalisés en 2016 (sur 21 lancements ouverts au total). "Nous nous battons avec Arianespace, avec l'ensemble des acteurs industriels européens, sur un marché qui ne représente qu'un quart du marché total des lancements. Et sur ce marché (de) 21 lancements en 2016, Arianespace a encore été le leader", a fait observer Alain Charmeau. Un leadership gagné grâce à la fiabilité et à la disponibilité d'Ariane 5 qui a réalisé son 76e succès d'affilée l'année dernière avec un vol réussi en décembre. Ainsi, le lanceur lourd européen a dépassé le précédent record de 74 consécutifs établi par Ariane 4.