Quand Denis Ranque (Airbus) est sous la pression de l'Etat français

Par Michel Cabirol  |   |  521  mots
Emmanuel Macron et Tom Enders lors du salon aéronautique du Bourget en juin 2017
Paris attend du président du conseil d’administration d'Airbus un rôle moins conciliant avec Tom Enders, le patron du constructeur aéronautique.

Denis Ranque est sous la pression de l'État français. "La France doit parvenir à un dialogue avec le président du conseil d'administration d'Airbus pour pouvoir obtenir autre chose qu'un vote de confiance sur la gestion de Tom Enders", explique-t-on de façon très sèche au sein de l'État à La Tribune. Au ministre de l'Économie et des Finances Bruno Le Maire, qui a Airbus dans son périmètre, d'instaurer un dialogue un peu plus musclé. Le ministre "doit mettre la pression sur Denis Ranque pour faciliter l'expression de la volonté des États" partenaires du constructeur européen. Pour Paris, il existe clairement un problème de gouvernance et l'expression de ses inquiétudes passe désormais par Denis Ranque, depuis le départ de Marwan Lahoud en février dernier.

Interrogé mardi par la Tribune sur le dossier Airbus lors de l'inauguration à Paris de la "Digital Factory" du groupe Thales, Bruno Le Maire a expliqué qu'il avait été "informé" dès sa nomination comme ministre de l'Économie et des Finances "des allégations sur des versements illégaux dans le cadre de contrats à l'étranger". "J'ai regardé cela de très près, a-t-il expliqué. J'ai immédiatement convoqué le président du conseil d'administration d'Airbus pour lui demander de faire la transparence sur ces allégations, de m'apporter des explications, d'apporter à l'État français des explications et au-delà de ces explications de fournir un plan de bataille de réponses pour mettre bon ordre, si besoin en est, à cette situation". Denis Ranque a apporté "des éléments sur la transparence, des éléments de réponses que nous sommes en train d'étudier".

La France démunie

Pour la France, la situation au sein d'Airbus est un "sujet grave" car il a un impact "important, très important" sur l'économie en général, et en particulier, sur le transport aérien. C'est d'ailleurs pour cela que le dossier est personnellement pris en main par Emmanuel Macron, notamment par le secrétaire général de l'Élysée, Alexis Kohler. Le président et son plus proche entourage ont pris conscience de l'extrême gravité de la situation et seraient prêts à en découdre face aux États-Unis, qui avance pour le moment masqué, ainsi que face à Tom Enders, accusé "de faire porter la responsabilité de cette situation à l'ensemble du collectif".

Pour autant, la France (11,1% du capital), qui ne siège pas au conseil d'administration d'Airbus, semble démunie pour faire avancer ses positions. "Si le conseil d'administration continue à faire confiance à son président, nous tous en sommes réduits à observer une situation où on n'a pas de prise", explique-t-on à La Tribune. Pourtant, tout comme en Allemagne, Paris est préoccupé par un groupe "gravement affaibli", qui participe à la souveraineté nationale et emploie de très nombreux Français (54.500, soit 37% des salariés du groupe). En outre, la France exporte via Airbus plus de 20 milliards d'euros de plateformes aéronautiques et spatiales chaque année. Enfin, Airbus fait travailler 9.300 entreprises françaises et leur commande pour 12 milliards d'euros par an.