Le franc suisse s'envole, les horlogers s'affolent

Par Marina Torre  |   |  492  mots
Les montres suisses, déjà parmi les plus onéreuses au monde, pourraient encore voir leurs prix grimper.
Les principaux groupes de luxe suisses subissent ce jeudi à Zurich le contrecoup de la suppression du taux plancher du franc suisse face à l'euro. Les prix à l'export devraient flamber, et les actions s'effondrent.

"Ce que la BNS provoque là, c'est un tsunami. Aussi bien pour l'industrie d'exportation que pour le tourisme, mais également pour l'ensemble de la Suisse".

C'est ainsi que Nick Hayek, le patron du groupe Swatch, a commenté auprès de la presse l'abandon ce jeudi par la Banque nationale suisse (BNS) du taux plancher entre le franc hélvétique et l'euro. Une décision qui a provoqué un bond du franc face à la devise européenne et à d'autres monnaies internationales.

30% plus chers

Pendant la journée, les produits "made in Switzerland" sont un temps devenus virtuellement plus chers de 30% du fait de cet abandon. Désormais, les prix peuvent en outre fluctuer bien plus qu'au cours des trois dernières années, quand le cours plancher de 1,20 franc pour un euro ne pouvait être franchi. A 15h00, la parité était de 1,018 franc suisse pour 1 euro.

En première ligne, Swatch mais aussi le groupe de luxe Richemont (Piaget, Baume et Mercier, Montblanc etc.) en subissent directement le contrecoup à la Bourse de Zurich. L'action du premier, qui exporte presque toute sa production, chutant de 15,95% à 384,10 francs en début d'après-midi.

Des montres plus chères?

"L'impact négatif potentiel pour les bénéfices peut atteindre 8 à 10%" pour Swatch dans le cas où un enchérissement de 13% du franc suisse par rapport à l'euro se poursuivrait pendant un an, calcule Citigroup dans une note d'analyse. Une note de perspective devrait prochainement être publiée par l'entreprise indique une porte-parole.

L'horloger ne répercutera pas forcément tout ou partie de cette brusque hausse du cours sur le prix des montres. A cet égard "Swatch se montre traditionnellement moins agressif que Richemont dans l'utilisation des prix [pour le consommateur final] pour contrebalancer l'effet des fluctuations monétaires", pointe l'analyste de Citi spécialisé dans le secteur du luxe.

Déjà des ralentissements en Asie

D'autres professionnels de l'horlogerie s'inquiètent également. Selon la Fédération de l'industrie horlogère suisse (FH), celle-ci exporte près de 95% de sa production. "Nous relevons en outre que le choix de la BNS intervient dans un contexte européen difficile pour nous. Nos principaux marchés européens comme l'Allemagne et la France accusent déjà de fortes baisses. En outre la situation reste aussi difficile en Asie", a commenté Jean-Daniel Pasche, le patron de la fédération, dans la presse suisse.

Des lois anti-corruption en Chine, un ralentissement relatif de la croissance dans le pays mais aussi plus récemment des mouvements contestataires à Hong Kong ont en effet affecté les ventes des groupes horlogers. A taux de change constant, les ventes de Richemont en Asie-Pacifique ont par exemple baissé de 12% au cours des trois mois derniers mois de 2014, selon un rapport publié ce 15 janvier. Ses comptes au 31 décembre restent toutefois largement dans le vert puisqu'il dispose de près de 5 milliards d'euros de trésorerie (600 millions d'euros de plus que l'année précédente).