Sécheresse : quelles mesures pour soutenir les éleveurs et les agriculteurs ?

Par Clémentine Maligorne  |   |  895  mots
« La qualité de la récolte française 2022 permettra néanmoins de répondre aux attentes des marchés », rassure le ministère de l'Agriculture. (Crédits : Reuters)
Le ministre de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire, Marc Fesneau, a annoncé une série de mesures pour soulager les acteurs du monde agricole. Parmi celles-ci : une hausse du plafond d'avance des aides de la PAC à partir de la mi-octobre, représentant une enveloppe de 1,5 milliard d'euros.

Les épisodes de sécheresse qui ont touché la France cet été ont des conséquences parfois lourdes sur l'agriculture et notamment l'élevage. D'une culture à l'autre cependant, les dégâts ne sont pas les mêmes. « Les conditions climatiques exceptionnelles ont conduit à une disparité inédite des rendements pour la plupart des grandes cultures. La qualité de la récolte française 2022 permettra néanmoins de répondre aux attentes des marchés », selon un communiqué transmis par FranceAgrimer, organisme qui dépend du ministère de l'Agriculture. Un constat repris par ce même ministère qui tenait lundi sa troisième réunion du comité de suivi de la situation de sécheresse.

Le ministère de l'Agriculture constate ainsi un recul des productions pour certains fruits et légumes, en termes de quantités ou de qualité. Cela concerne par exemple les concombres, les courgettes ou encore les melons. En revanche, sur d'autres productions, les premières tendances de récolte sont plutôt encourageantes. C'est le cas pour les pommes, les pêches ou encore les abricots par exemple. Concernant le raisin, la production viticole se situerait dans la moyenne quinquennale (entre 42,6 et 45,6 millions d'hectolitres).

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« Sur le tournesol, la production sera stable », a ajouté le ministre Marc Fesneau lors d'un point de presse lundi qui s'est tenu du comité de suivi, alors qu'au niveau européen, les prévisions actuelles de rendement sont inférieures de 12 % à la moyenne sur 5 ans, selon la Commission européenne. Et pour les céréales à paille (blé tendre, orge...) la récolte française est elle aussi « globalement stable, mais tout ça cache une grande disparité selon les régions », a nuancé le ministre de l'Agriculture.

Inquiétudes sur l'élevage

« En ce qui concerne le maïs grain, on est sur une baisse estimée de plus de 18% de la production à date, du mois d'août 2022 par rapport à l'an dernier », a encore indiqué le ministre. La baisse de production du maïs grain, principalement utilisé pour l'alimentation animale, inquiète d'autant plus qu'elle se cumule à la baisse de la production d'herbe (-21% sur un an, avec une accélération de la dégradation en juillet). Au niveau européen, les prévisions actuelles de rendement pour le grain de maïs ne sont pas beaucoup plus encourageantes. D'après la Commission européenne, elles sont inférieures de 16 % à la moyenne sur 5 ans.

« Le risque que j'identifie à moyen terme est sur l'élevage », a relevé le ministère français de l'Agriculture. « Puisque les éleveurs mobilisent traditionnellement les fourrages, les prairies ou le mais qu'ils produisent eux-mêmes pour nourrir leurs bêtes, on a un problème d'alimentation animale (...) Ils ont l'habitude d'y faire face en hiver mais là, on est en plein mois d'août », a-t-il explicité sur France Info.

Régime des calamités agricoles

Dans ce contexte, une série de mesures pour soutenir les acteurs du monde agricole et préserver au maximum les trésoreries, a été annoncée lundi. « C'est une première série de mesures pour des cultures qui n'ont pas encore été récoltées (comme le maïs, le tournesol) », s'est félicité Marc Fesneau mardi matin. « On sait qu'on va avoir des difficultés. On verra ensuite à l'automne, une fois la saison terminée, comment compléter éventuellement les dispositifs », a-t-il prévenu.

Parmi les mesures qui figurent dans ce premier volet de mesures de soutien : le régime des calamités agricoles sera mobilisé « pour les cultures éligibles ». Les avances versées dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC) seront renforcées. Par exemple, l'indemnité compensatoire de handicap naturel, habituellement fixée à hauteur de 75%, sera versée à hauteur de 85% et les avances pour les aides découplées, habituellement à hauteur de 50%, seront versées à hauteur de 70%. L'an dernier, ces avances avaient concerné 285.000 agriculteurs pour un montant de près de 4,5 milliards d'euros, précise le ministère de l'Agriculture.

Des ajustements sur les AOP

Des dispositifs de droit commun, comme les exonérations de taxe sur le foncier non-bâti ou de cotisations sociales, vont être également activées.

Par ailleurs, sur certains produits labellisés ou sous appellations d'origines contrôlées, qui voient leurs cahiers des charges impossibles à remplir, le ministère promet  des « ajustements ». C'est le cas par exemple pour certains fromages, fabriqués à partir de lait qui doit normalement provenir de vaches qui se sont principalement nourries dans les prairies. Exceptionnellement, cette obligation va être levée. Même chose par exemple pour le piment d'Espelette qui doit en principe être arrosé seulement dans le premier mois suivant la semence. Mais là aussi, des dérogations vont être accordées.

Le ministre n'exclut pas de nouvelles mesures. D'autant que la sécheresse se poursuit malgré les récents orages. Au niveau européen, 47 % du territoire de l'UE est toujours en état d'avertissement de sècheresse, ce qui signifie que les précipitations ont été moins élevées que d'habitude et que l'humidité du sol est déficitaire. Et même 17 % du territoire de l'UE est en état d'alerte, ce qui signifie que la végétation et les cultures sont gravement affaiblies par le manque d'eau.