La famille Peugeot restera-t-elle le premier actionnaire de PSA après l'éventuelle entrée de l'Etat français ?

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  912  mots
Thierry Peugeot, président du conseil de surveillance (à gauche) et Philippe Varin, président du directoire (à droite)
PSA prépare une augmentation de capital de trois milliards d'euros, qui verrait l'Etat et le groupe chinois Dongfeng investir chacun 1,5 milliard d'euros et prendre chacun une participation de 20% à 30%, selon l'agence Reuters. La famille Peugeot apparait divisée sur sa participation à une augmentation de capital de PSA pour contrebalancer l'influence du chinois Dongfeng

PSA prépare une augmentation de capital de trois milliards d'euros, qui verrait l'Etat et le groupe chinois Dongfeng investir chacun 1,5 milliard d'euros et prendre chacun une participation de 20% à 30%, selon l'agence Reuters. "Dans ce scénario, ce sont l'Etat français et la famille Peugeot qui auront le contrôle de PSA", note une source bancaire française.

Montera, montera pas dans le capital de PSA ? "La famille Peugeot est divisée. Il y a ceux qui sont prêts à encore investir dans PSA pour rester le premier actionnaire du groupe, même ex aequo avec le chinois Dongfeng aujourd'hui prêt à investir. Et puis il y a ceux qui ne souhaitent plus rien débourser", explique à latribune.fr une source proche du dossier. 

Toute la question est là. Le capital de PSA Peugeot Citroën est contrôlé aujourd'hui à 25,2% par la famille fondatrice - qui possède 37,9% des droits de vote - et son allié américain General Motors qui en détient 7% depuis 2012.

Augmentation de capital jusqu'à 50%

La dernière assemblée générale des actionnaires en avril a autorisé le directoire de PSA a procéder à une augmentation de capital jusqu'à 177,4 millions d'actions, sur un capital social de  355 millions. Soit donc une augmentation pouvant aller jusqu'à 50%. Celui ou ceux qui y souscriraient pourraient donc détenir jusqu'à un tiers du capital du constructeur après ladite opération. 

"Dongfeng Motors est en pourparlers pour acquérir une participation dans PSA, qui est à la recherche de fonds", affirmait dernièrement le China Business News. Citant une personnalité du groupe chinois Dongfeng mais sans la nommer, le journal des affaires assure que le consortium automobile chinois "mène des discussions préliminaires pour prendre 30% de PSA".

Qui à la présidence du conseil de surveillance?

Si elle ne souscrit pas aussi à cette augmentation de capital, la famille Peugeot deviendrait de facto  le deuxième actionnaire derrière Dongfeng. "Celui qui prendrait 30% du capital de PSA serait l'actionnaire de référence. Il pourrait même revendiquer la présidence du conseil de surveillance", souligne un expert. Entre PSA et Dongfeng, ce n'est toutefois pas encore fait. "Nous ne sommes parvenus à aucune conclusion pour l'instant et nous sommes loin d'avoir atteint ce point", précisait fin septembre  le conglomérat industriel chinois.

Sacrilège, puisque c'est traditionnellement un membre de la famille Peugeot  qui occupe ce poste, Thierry Peugeot en l'occurrence depuis 2002. La famille Peugeot ne peut ni ne veut souscrire seule à l'augmentation de capital. Loin s'en faut. Et GM a réitéré à plusieurs reprises qu'il ne souhaitait pas monter dans le capital du français. Il risque même d'être dilué lors de l'augmentation de capital qui se profile dans l'état actuel des discussions... A moins qu'il ne décide de sortir. Mais, les Peugeot pourraient faire quand même un nouvel effort. "Les Peugeot pourraient donc in fine monter à parité", histoire de ne pas perdre la face, souligne notre informateur.

L'autre possibilité, évoquée par l'agence Reuters, serait la participation de l'Etat français à l'augmentation de capital. A Washington, le ministre de l'économie Pierre Moscovici a confirmé que le gouvernement suivait "de très près" le dossier PSA. Mais que "la question aujourd'hui n'est pas d'abord celle de l'entrée de l'Etat ou d'un constructeur au capital, c'est celle des bons partenariats industriels à développer pour PSA", a souligné Pierre Moscovici, lors d'une conférence de presse en marge de la réunion annuelle du FMI. 

Le gouvernement français risque cependant d'avoir la clé de la future recapitalisation de PSA.  On voit mal Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, accepter de laisser filer PSA entre les mains d'un groupe chinois, dont l'intérêt est  d'avoir un accès direct à sa technologie. Et pour PSA, la voix de l'Etat a du poids. Car le constructeur tricolore a besoin de l'Etat français, qui apporte sa garantie à la Banque PSA Finance et avec qui il risque d'avoir à négocier de nouveaux plans sociaux... Compliqué.

Le montant de la transaction en question

En forte crise, PSA a un cruel besoin d'argent frais pour poursuivre ses investissements et renouveler ses produits, alors qu'il devrait encore brûler 1,5 milliard d'euros de cash cette année.

Les négociations avec Dongfeng durent depuis quelque temps déjà. Le constructeur chinois propose "1,6 milliard de dollars (1,2 milliard d'euros)", assure le China Business News. Une proposition basse. Au cours actuel de l'action, 30% de PSA vaudraient grosso modo 2 milliards d'euros. Pour l'instant, " les discussions achoppent sur le montant", insiste une source industrielle.

Il y a "un certain nombre de réflexions en cours" entre PSA Peugeot Citroën et le groupe automobile chinois Dongfeng, avait déclaré laconiquement fin septembre Philippe Varin, président du directoire  constructeur tricolore, restant muet cependant sur l'éventualité de voir Dongfeng entrer au capital du groupe hexagonal. Dongfeng est depuis les années 90 le partenaire de PSA en Chine.

Leur co-entreprise locale DPCA dispose de trois usines à Wuhan (centre de la Chine) d'une capacité de production de 600.000 unités. Ses ventes dans le pays ont progressé de 33% au premier semestre à 278.000 et Citroën. Mais, jusque là, les relations entre les deux groupes sont restées cantonnées à leur co-entreprise chinoise. Dongfeng, qui était à l'origine un producteur de camions notamment pour l'armée, a d'ailleurs créé des co-entreprises avec d'autres constructeurs étrangers comme Nissan. Et il vient de s'allier au suédois AB Volvo... dans les poids-lourds.