PSA : le grand tournant pour le constructeur français en crise

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  840  mots
Carlos Tavares, nouveau patron du directoire de PSA
PSA Peugeot Citroën a officialisé ce mercredi, à l'occasion de la visite du président chinois à Paris, son mariage avec Dongfeng. Un tournant historique pour le groupe, avec l'entrée de l'Etat français et du groupe public chinois dans son capital.

 Le constructeur automobile PSA Peugeot Citroën, en crise, a officialisé ce mercredi, à l'occasion de la visite du président chinois à Paris, son mariage avec Dongfeng, sous l'égide de l'Etat français. L'accord a été signé en présence de Xi Jinping et du chef de l'Etat français François Hollande à l'Elysée en fin d'après-midi.

Tournant historique pour PSA

C'est ensuite - avec une heure de retard  sur l'horaire prévu - que Philippe Varin, patron sortant de PSA, Pierre Moscovici, ministre de l'Economie et des finances, et Xu Ping, président du groupe public chinois Dongfeng, ont tenu une conférence de presse commune à l'Hôtel d'Evreux, place Vendôme. En présence d'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, et de Robert Peugeot, représentant de l'actionnariat familial du groupe automobile tricolore.

Un tournant historique, avec l'entrée d'un constructeur chinois pour la première fois dans un grand groupe automobile occidental et une prise de participation inédite de l'Etat français dans PSA, si longtemps attaché à son indépendance. Ironie de l'histoire, l'Etat aura quasiment la même part au capital des deux constructeurs français, de PSA, le constructeur traditionnellement privé, et de Renault, l'ancienne Régie...

"C'est le plus gros investissement chinois en France", s'est félicité Pierre Moscovici, soulignant  s'être "beaucoup impliqué avec Arnaud Montebourg" dans le projet. "Cette opération assure la pérennité de PSA", a-t-il assuré, rappelant que la filière automobile jouait un rôle clé en France, avec "plus de 400.000 emplois directs".

3 milliards d'augmentation de capital

L'accord entre PSA, Dongfeng et l'Etat français avait été dévoilé à la mi-février dernier. Il prévoit que l'Etat et le constructeur chinois déboursent chacun 800 millions d'euros pour prendre l'un et l'autre 14% du capital. La famille Peugeot mettra, elle, moins de 100 millions. Le solde (près de 1,4 milliard) sera levé sur le marché, le tout au prix de 7,50 euros l'action.

A l'issue de l'augmentation de capital de 3 milliards d'euros, qui sera lancée dans la foulée de l'assemblée générale des actionnaires prévue le 25 avril, la famille fondatrice Peugeot - aujourd'hui actionnaire à hauteur de 25,4% du capital et 38,1% des droits de vote - devrait redescendre elle-même à 14%.

Un nouveau patron du conseil de surveillance

Le constructeur avait confirmé la semaine dernière le choix de Louis Gallois comme futur président de son conseil de surveillance, en remplacement de Thierry Peugeot. Tout un symbole. Le constructeur chinois sera représenté au conseil de surveillance par son propre président, Xu Ping, et par son directeur général adjoint Liu Weidong. Carlos Tavares, ex-numéro 2 de Renault, deviendra, lui, le président du directoire du groupe PSA à la fin du mois.

Au crucial volet financier, qui va permettre à PSA en mal d'argent frais d'avoir les moyens de financer ses projets - du moins à court terme -, s'ajoute un volet industriel et commercial, avec une volonté de renforcement de PSA en Chine et en Asie du sud-est - où il est très faible - ainsi que la réalisation de synergies industrielles avec le groupe chinois pour environ 400 millions d'euros par an (pour le seul PSA) à l'horizon 2020. Une plate-forme à bas coûts pour des véhicules destinés aux pays émergents est à l'étude.

Co-entreprise pour l'Asie du sud-est

Sur la seule Chine, PSA prévoit de tripler les ventes de DPCA, sa co-entreprise historique avec Dongfeng à 1,5 million d'unités en 2020.  Avec à la clé la création d'une nouvelle usine s'ajoutant aux trois que possède déjà PSA avec Dongfeng en Chine. Le lancement de deux à trois modèles par an pour l'ensemble des trois marques (Peugeot, Citroën et la marque propre de DPCA) est prévu.

Les deux parties créeront également une co-entreprise pour l'Asie du sud-est et d'autres marchés émergents.  Les accords stipulent aussi la création d'un centre de recherche et développement  commun, dédié au développement des produits et technologies pour les marchés à forte croissance, dont la Chine.

Pertes importantes

Le groupe a affiché des résultats financiers 2013  largement dans le rouge. Le constructeur a consommé certes seulement 426 millions d'euros de cash l'an dernier, alors qu'il avait prévu initialement d'en brûler 1,5 milliard - contre 3 milliards en 2012. PSA a également enregistré un résultat opérationnel courant en perte de 177 millions d'euros seulement, ce qui est aussi satisfaisant par rapport aux 560 millions de l'année noire 2012. Ca, ce sont les bonnes nouvelles.

En revanche, les activités automobiles seules, au coeur des activités du groupe, ont affiché un chiffre d'affaires en baisse de 4,8% à 36,5 milliards et une perte opérationnelle supérieure à un milliard (1,042 exactement). Cela représente une diminution, certes, à comparer avec le 1,49 milliard de 2012. Mais il n'empêche, le taux de marge reste négatif de 2,9% pour la division automobile! Même divisée par deux, la perte nette du constructeur reste immense, à savoir 2,31 milliards d'euros! La dette nette de PSA au 31 décembre 2013 était encore de 4,15 milliards.