La hausse de 169% de la rémunération de Carlos Ghosn est-elle justifiée ?

Par Nabil Bourassi  |   |  525  mots
La rémunération de Carlos Ghosn est passée de 2,6 à 7,2 millions d'euros.
Les émoluments du patron du groupe Renault vont atteindre 7,2 millions d'euros en 2015, contre 2,67 millions d'euros l'année dernière, sans compter ses revenus de PDG de Nissan. Si l'année 2014 a été bonne pour Renault, le groupe reste fragile, dix ans après l'arrivée de Carlos Ghosn à sa tête.

Cela fait des années que Renault se confond en règles arithmétiques pour justifier la rémunération de son PDG, Carlos Ghosn. Jusqu'ici, il était encore assez aisé de comprendre que, dans les 10 millions d'euros de revenus perçus en 2014, « seuls » 2,67 millions provenaient de ses activités de Pdg de Renault, le solde procédant de ses fonctions de Pdg de Nissan.

Comment comprendre alors la hausse de 169% de ses émoluments pour l'année 2015 ? En effet, Carlos Ghosn peut prétendre cette année à une rémunération de 7,2 millions d'euros, et cela, uniquement au titre de son statut de Pdg de Renault.

Salaire fixe inchangé et... objectifs atteints

Dans le détail, rappelons que son salaire fixe, lui, n'a pas changé. Il est d'ailleurs le même depuis 2011, à 1,23 million d'euros.

C'est l'amélioration de la rentabilité de Renault en 2014 qui a fait gonfler sa part variable. Cette part augmente ainsi de 31%, à 1.814.250 euros, dont 25% est versé en numéraire et le reste sous forme d'actions bloquées jusqu'en 2018. A cela s'ajoute enfin près de 100.000 actions d'une valeur de 4,1 millions d'euros.

Les statuts de l'entreprise prévoient que la part variable peut monter jusqu'à 150% du salaire fixe. Carlos Ghosn ayant rempli 90% de ses objectifs (cash-flow, marge opérationnelle, suivi de l'accord de compétitivité...), il pourra donc engranger 147,5% de sa rémunération supplémentaire, soit 1,814 million d'euros.

Une année 2014 satisfaisante, avec un résultat net triplé...

Il faut dire que Renault a publié des résultats de bonne facture pour son exercice 2014. Le chiffre d'affaires a progressé de 0,3% à 41,055 milliards d'euros (+3,1% hors effet de change). Le résultat net a presque triplé, à 1,9 milliard d'euros, tandis que le résultat opérationnel est repassé dans le vert à 1,1 milliard d'euros (contre une perte de 34 millions l'année précédente).

Mieux encore, le groupe a annoncé le recrutement de 1.000 CDI, conformément aux engagements pris par le constructeur dans le cadre de ses accords de compétitivité. Ajoutons que le renouvellement de la gamme paraît bien engagé avec certains succès notables tel le Captur.

...mais un groupe encore vulnérable

De belles performances donc, mais qui dissimulent mal les faiblesses structurelles du constructeur français, faiblesses que Carlos Ghosn n'est pas parvenu à endiguer en dix ans de mandat.

Le résultat net est le produit de la contribution de Nissan (filiale à 44%) à hauteur de 1,55 milliard d'euros. Renault construit deux fois moins de voitures que son partenaire alors même qu'ils en construisaient presque autant lors de la fondation de l'alliance en 1999.

Mission remplie ?

Les difficultés en Amérique latine, la situation très précaire en Russie, l'arrivée tardive sur le marché chinois, le semi-échec de la voiture électrique... PDG depuis neuf ans de Renault, Carlos Ghosn est loin d'avoir rempli sa mission et Renault reste un groupe vulnérable.

En 2014 déjà, Carlos Ghosn était l'un des patrons les mieux payés du monde automobile, du moins, mieux que ses homologues japonais puisqu'il  gagnait 6,5 fois plus que Takanobu Ito (à l'époque, Pdg de Honda) et quatre fois le salaire d'Akio Toyoda (Pdg de Toyota, hors dividendes d'actionnaire familial).