Renault pourrait supprimer des usines après ses premières pertes en dix ans

Par Daniel Aronssohn, AFP  |   |  816  mots
Le groupe au losange est tombé dans le rouge l'an dernier pour la première fois depuis 2009. (Crédits : Reuters)
"Nous n'avons aucun tabou et nous n'excluons rien", a déclaré Clotilde Delbos, la directrice générale par intérim de Renault, interrogée sur la possibilité que des usines en France ou dans le monde puissent être fermées.

[Article publié le 14/02 à 12h22, mis à jour le 14/02 à 14h50]

Le constructeur automobile français Renault a annoncé, ce vendredi, qu'il pourrait supprimer des usines dans le cadre d'un vaste plan d'économies après avoir enregistré sa première perte depuis 2009.

"Nous n'avons aucun tabou et nous n'excluons rien", a déclaré la directrice générale par intérim, Clotilde Delbos, interrogée lors d'une conférence de presse sur la possibilité que des usines en France ou dans le monde puissent être fermées pour redresser l'entreprise.

"Notre objectif est de réduire nos coûts de structure d'au moins 2 milliards d'euros au cours des trois prochaines années", a-t-elle expliqué, soulignant que le groupe au losange annoncerait en mai son plan de redressement.

Renault a publié, ce vendredi matin, une perte nette de 141 millions d'euros sur 2019, affecté par le recul de ses ventes et de sa rentabilité opérationnelle, dans un marché mondial en baisse. Il subit aussi la chute de la contribution financière de Nissan, son allié japonais en difficulté, et l'abandon d'une créance fiscale en France se traduisant par une charge de 753 millions d'euros.

Le groupe a vu ses volumes reculer de 3,4% l'an dernier à 3,75 millions de véhicules.

Et il ne voit pas encore le bout du tunnel. Pour 2020, dans un marché mondial toujours baissier, Renault anticipe une nouvelle dégradation de sa rentabilité opérationnelle. Sa marge devrait atteindre 3% à 4% des ventes, après 4,8% en 2019 et 6,3% en 2018.

"2019 a été une année difficile pour Renault [...]. Nous ne sommes pas satisfaits des résultats", a commenté Mme Delbos. Mais elle s'est dite "convaincue" que le constructeur français avait "tous les atouts" pour se rétablir.

Elle a cité les véhicules électriques, dont Renault a été pionnier, et la gamme de véhicules "low cost" dont la filiale roumaine Dacia est le fer de lance en Europe.

Renault a vendu en janvier 10.000 exemplaires de sa citadine électrique Zoe récemment renouvelée, un chiffre record. Le constructeur assure avoir profité des progrès des dernières versions de ses "best-seller" Clio et Captur pour augmenter ses prix de ventes.

Mais, comme ses concurrents, il doit investir des sommes importantes en recherche et développement pour accélérer l'électrification de ses modèles afin de respecter les plafonds d'émissions de CO2 fixés par l'Union européenne dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Pour Mme Delbos, c'est un sujet d'inquiétude, alors que les constructeurs sont "sans certitude sur l'appétence des clients" pour ces véhicules.

Lire aussi : Fiat Chrysler et Foxconn projettent une coentreprise de voitures électriques

S'appuyer sur Nissan

Renault entend s'appuyer sur le partenaire Nissan, dont il détient 43%, pour faire des économies. Après des mois de crise dans le sillage de l'affaire Ghosn, les deux groupes entendent mettre davantage en commun leurs technologies et leurs usines pour dégager des synergies qui se font attendre depuis des années.

Lire aussi : L'alliance Renault-Nissan est-elle morte, comme le prétend Carlos Ghosn ?

Le président de Renault, Jean-Dominique Senard, arrivé il y a un an, a affirmé sa confiance dans la nouvelle équipe dirigeante, avec l'arrivée prévue en juillet de Luca de Meo, transfuge de Seat (groupe Volkswagen) et aussi le recrutement de Gilles Le Borgne, chef de l'ingénierie venu du rival PSA (Peugeot, Citroën).

Lire aussi : Luca de Meo peut-il sauver Renault ?

"L'intensité du travail de l'alliance n'a jamais été aussi forte depuis que j'ai rejoint le groupe", a assuré M. Senard, laissant entendre que la phase d'instabilité, qui a suivi l'arrestation de Carlos Ghosn au Japon sur une dénonciation de Nissan en novembre 2018, était désormais surmontée.

Alors que des analystes se sont inquiétés des capacités de financement de Renault, Mme Delbos a souligné que le groupe disposait de plus de 15,8 milliards d'euros de liquidités et n'avait aucun problème de trésorerie. "Sur ce sujet, je dors sur mes deux oreilles", a-t-elle dit.

En revanche, "la Chine est une source d'inquiétude". Renault est très loin de ses objectifs de ventes dans le pays ce qui a conduit à une dépréciation de 400 millions d'euros l'an dernier.

Par ailleurs, les prévisions 2020 ne tiennent pas compte d'un éventuel impact de la crise sanitaire du nouveau coronavirus, impossible à évaluer. "Quelques pièces commencent à manquer dans certaines usines, donc nous pourrions avoir quelques jours d'arrêt ici ou là dans les prochaines semaines. Ce n'est rien de majeur si la production redémarre vite", a expliqué Mme Delbos.

Lire aussi : Industrie, électronique, tourisme... L'épidémie du coronavirus affecte déjà les multinationales du monde entier

Le groupe a annoncé une division par trois du dividende à 1,1 euro par action.

Vers 12h30, le titre Renault, proche de son plus bas niveau en dix ans, gagnait 1,5% à 35,3 euros, dans un marché stable.