Immobilier : les prix des logements anciens piquent du nez

Par latribune.fr  |   |  1032  mots
Ainsi, au quatrième trimestre 2023, les prix de l'ancien ont plongé de 4% sur un an. (Crédits : REUTERS/Charles Platiau)
Les prix de l'immobilier dans l'ancien ont continué de baisser au quatrième trimestre 2023, d'après l'indice Notaires-Insee, symptôme de la crise de l'immobilier. Et 2024 ne s'annonce pas sous de meilleurs auspices.

Après trois années de flambée consécutives à la crise du Covid-19, les prix de l'immobilier poursuivent leur décrue. Ainsi, au quatrième trimestre 2023, les prix de l'ancien ont plongé de 4% sur un an, d'après l'indice Notaires-Insee de référence publié ce jeudi. La chute est d'autant plus spectaculaire que les prix étaient encore en progression au 2e trimestre 2023 de 0,5%.

Dans le détail, la chute des prix, selon les données provisoires corrigées des variations saisonnières, concerne autant les appartements (-4,1%) que les maisons (-3,8%). A noter que les calculs des notaires, établis sur les ventes définitives et non sur les compromis de vente ou les prix des annonces, ont quelques semaines de retard sur les tendances du marché, mais ils sont plus exhaustifs.

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Des différences entre les régions

Le repli est particulièrement fort en Île-de-France avec une baisse annuelle de 6,9% contre 2,9% en moyenne pour les autres régions de l'Hexagone. Une baisse qui se poursuit à la même allure que ce soit pour les appartements ou les maisons.

L'Île-de-France fait surtout face à un nouveau phénomène : les prix chutent non plus seulement à Paris, mais aussi en petite couronne et en grande couronne dans des proportions comparables. Concernant Paris intra-muros, le plus cher arrondissement, le 6ème, passe sous la barre des 14.000 euros le mètre carré. Le plus abordable, soit le 19ème, passe sous les 8.000 euros du mètre carré.

A l'inverse, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur échappe largement à la dégringolade avec une baisse de seulement 0,6%, contrairement aux Hauts-de-France (-4,4%) et à l'Auvergne-Rhône-Alpes (-4,1%), où la chute dépasse même les 9% à Lyon. Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim), l'explique par la forte proportion de retraités, à plus fort patrimoine et moins dépendants des conditions de crédit. Corinne Jolly, présidente de Particulier à particulière, ajoute, elle, le critère de la qualité de vie, devenu plus important pour les acquéreurs et qui s'observe dans le dynamisme des communes littorales.

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Faiblesse des transactions

Des prix qui baissent à cause d'une plus faible demande historique dans un contexte de difficultés d'accès au crédit. En effet, le nombre de transactions enregistrées en 2023 plonge lui aussi, à 869.000 contre 1,12 million un an auparavant.

En Île-de-France, les ventes de logements anciens ont enregistré un recul de 25% en 2023 par rapport à l'année précédente, avec à peine 140.000 ventes. Soit « un niveau d'activité historiquement bas », pointent les Notaires du Grand Paris.

L'année 2023 « est enfoncée dans une crise qui avait déjà été amorcée depuis deux ans et qui se concrétise », a d'ailleurs prévenu Elodie Frémont, présidente de la commission statistiques immobilières des notaires du Grand Paris ce jeudi. « Sa spécificité, c'est que ça s'accélère, surtout en volume de transactions ».

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Baisse du crédit

Cette baisse des prix et des transactions découle de la baisse du pouvoir d'achat immobilier des ménages. 2023 a été marquée par la hausse des taux de crédit, découlant de la politique monétaire restrictive de la Banque centrale européenne (BCE). Les taux directeurs de la BCE ont subi près de 10 hausses consécutives pour juguler l'inflation et atteignent actuellement un niveau record de 4%.

Tous les espoirs se tournent donc désormais vers une prochaine baisse des taux directeurs de la BCE, de plus en plus envisagée. Après deux années de hausse dans le sillage des banques centrales, une légère baisse des taux de crédit en France s'est même amorcée en décembre, selon l'Observatoire Crédit Logement / CSA. Mais pas de quoi crier victoire trop vite. Car malgré la baisse des prix de l'immobilier, les écarts de prix sont encore trop grands entre les attentes des vendeurs et la capacité d'emprunt des acheteurs.

Les ménages candidats à l'emprunt sont donc contraints de revoir à la baisse leurs espérances en termes de surface ou de quartier, de gonfler leur apport ou bien de reporter leur projet d'achat à des jours meilleurs. La production de nouveaux crédits à l'habitat (hors renégociations) est d'ailleurs passée sous la barre des 10 milliards d'euros mensuels depuis l'été dernier, selon la Banque de France, une première depuis début 2016.

« Les acquéreurs doivent comprendre que leur capacité d'emprunt est maintenant réduite », observe Elodie Frémont. « Il faut qu'ils intègrent que leur apport doit être conséquent, donc il faut souvent une aide familiale ou une vente préalable », explique-t-elle, soulignant une augmentation de l'âge médian des acquéreurs et une surreprésentation des catégories socioprofessionnelles les plus aisées.

Et pour 2024 ?

Les prix de l'immobilier dans l'ancien devraient par ailleurs continuer à poursuivre leur décrue cette année, d'après les Notaires du Grand Paris.

Même son de cloche pour Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim), qui prévoit une baisse de 6 à 8% des prix en 2024. « On est vraiment au début du réajustement des prix sur le marché, qui devrait se poursuivre », affirme-t-il. Mais pas de quoi être pessimiste pour autant.

« Les acquéreurs, aujourd'hui, reprennent la main sur le marché, revisitent, reprennent un pouvoir de négociation », remarque-t-il. « La seule façon qu'ils reprennent du pouvoir d'achat, c'est que la baisse des prix se poursuive ».

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De leurs côtés, les notaires se sont montrés plutôt pessimistes sur les tendances. Elodie Frémont voit apparaître « un attentisme qui est plutôt inquiétant », propriétaires et acquéreurs attendant des conditions de marché plus favorables, et également d'y voir plus clair sur les évolutions législatives, notamment sur la performance énergétique.

(Avec AFP)