"La PPE ne rouvre pas le débat sur la politique énergétique française"

Par Dominique Pialot  |   |  688  mots
Pour Arnaud leroy, président de l'Ademe, le débat sur la PPE ne doit pas remettre en cause la politique gravée dans la loi de transition énergétique. (Crédits : Reuters)
Présentant la contribution de l’Ademe, son nouveau président Arnaud Leroy a tenu à ramener le débat en cours sur la programmation pluriannuelle de l’énergie à un simple instrument de trajectoire ayant vocation à donner des signaux clairs aux différentes filières. Pour lui, il n’est pas question de rouvrir le débat sur la politique énergétique française, gravée dans la loi.

Les préconisations de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, développées dans son cahier d'acteur porté au débat en cours sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) sont simples : réduire de 30% la consommation nationale d'énergie entre 2016 et 2035, et multiplier par deux la part des énergies renouvelables entre 2016 et 2028, en augmentant leur production de 70%, pour la porter de 290 Térawattheures (TWh) aujourd'hui à 490 TWh. Ces 200 TWh supplémentaires proviendront essentiellement de cinq sources : l'éolien (de 25,5 à 28 gigawatts installés en 2028), le solaire photovoltaïque (de 27 à 30 GW), le bois énergie (+ 28 TWh entre 2016 et 2028), la méthanisation (+ 27 TWh) et les pompes à chaleur. Son directeur général Fabrice Boissier a rappelé que toutes les énergies renouvelables sont désormais compétitives face aux énergies fossiles, et le deviendront de plus en plus au vu de la tendance à la hausse qui se dessine et de la trajectoire pour la contribution énergie climat établie pour les prochaines années.

Cette contribution s'inscrit dans le cadre du débat sur la PPE pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028, que le gouvernement doit présenter en juillet avant un texte définitif prévu à la fin de l'année.

Jusqu'à 340.000 emplois en 2035

Mais Arnaud Leroy, qui préside l'agence depuis deux mois, a particulièrement insisté sur la nécessité d'abaisser la consommation, en agissant essentiellement sur l'efficacité énergétique dans le bâtiment (logement et tertiaire), l'industrie et les transports.

D'autant plus que, selon tous les scénarii macroéconomiques étudiés par l'Ademe, la conjonction d'une baisse de la consommation et d'un développement accéléré des énergies renouvelables se traduit par de la création d'emplois - jusqu'à 340.000 à l'horizon 2035, pour la plupart, non délocalisables - une amélioration de la balance commerciale française et une hausse du revenu disponible pour les particuliers.

En outre, cela favorise le développement économique de tous les territoires, ce qui est également l'un des points saillants des recommandations de l'Ademe. Au-delà d'une réalité macroéconomique positive, ses responsables soulignent la nécessité de bénéfices profitables à tous, aussi bien en ce qui concerne les particuliers que les régions (y compris les DOM-TOM). Il s'agit en effet de favoriser une certaine péréquation entre les territoires « pour que cette transition soit effectivement solidaire », comme le proclame la dénomination du ministère et pour éviter les risques de décrochages de certaines zones rurales ou de petites villes. Mais aussi pour limiter les inégalités, notamment en termes de précarité énergétique.

Le débat sur la politique énergétique est derrière nous

Concernant le solaire, l'Ademe met en garde contre la fixation de critères d'appels d'offres favorisant les grandes installations - et les grands acteurs, à commencer par EDF et son plan solaire de 30 GW programmé entre 2020 et 2035 - au détriment des plus petits.

Dans ce cadre, la PPE a vocation à donner « des signaux économiques clairs » et de « la visibilité » aux filières des différentes énergies. Mais pas à rouvrir un débat sur la politique énergétique française. « Il ne faut pas se tromper de focale. Ce débat-là a déjà eu lieu en 2012, il est clos », a insisté Arnaud Leroy.

Reconnaissant que certains ont voulu profiter du report (annoncé par Nicolas Hulot en novembre dernier) de l'échéance de 50% de nucléaire dans le mix électrique pour « relancer le match », il insiste :

« À ma connaissance, la position du gouvernement, c'est "la loi, rien que la loi", et il n'est pas prévu de la modifier. »

Par ailleurs, on peut regretter que ce débat (sur la PPE) ait lieu sans que l'on ait connaissance du rapport de l'ASN détaillant les coûts du grand carénage. Estimés, selon les sources, entre 45 milliards d'euros (entre 2014 et 2025 pour EDF), et 100 milliards d'euros (entre 2014 et 2033 pour la Cour des comptes), ces coûts pourraient en effet aider à dessiner la trajectoire des prochaines années. Mais ce rapport de l'ASN, qui implique de nombreux échanges avec l'opérateur, ne sera connu qu'en 2020.