Microplastiques : l'UE fait un grand pas vers l'interdiction

Par Giulietta Gamberini  |   |  567  mots
Minuscules polymères synthétiques et non biodégradables, les microplastiques s'accumulent dans les sols et dans les eaux, de surface comme souterraines. (Crédits : Dantor, via Wikipedia (CC BY-SA 3.0))
Une proposition de loi présentée par l'Agence européenne des produits chimiques vise à interdire l'ajout de ces minuscules polymères à divers produits.

Moins visibles mais plus nocifs que les emballages, les microplastiques pourraient bientôt faire l'objet de mesures radicales de l'Union européenne. À la fin de la semaine dernière, l'Agence européenne des produits chimiques (European chemicals agency, Echa) a, en effet, déposé une proposition de loi visant à interdire progressivement l'ajout aux produits cosmétiques, aux peintures, aux détergents, ainsi qu'à certains produits agricoles, médicaux, de construction, de 90% des microplastiques aujourd'hui utilisés. L'interdiction serait intégrée à REACH, l'ensemble législatif de l'UE sur les produits chimiques. L'objectif est d'ainsi éviter 400.000 tonnes de pollution plastique en 20 ans.

36.000 tonnes par an

Minuscules polymères synthétiques et non biodégradables, les microplastiques s'accumulent dans les sols et dans les eaux, de surface comme souterraines. Même si leur impact sur la santé humaine n'a pas encore été clairement établi, ils sont désormais entrés dans la chaîne alimentaire et affectent certains animaux.

Selon l'Agence européenne des produits chimiques, dans l'Union européenne, la quantité de microplastiques ajoutée intentionnellement aux produits qui s'infiltrent dans l'environnement chaque année "est estimée à environ 36.000 tonnes par an (dans une fourchette de 10.000 à 60.000 tonnes par an)". Cela correspondrait aux microplastiques qui pourraient être libérés en un an par 10 milliards de bouteilles en plastique, ou par un vortex de déchets six fois plus grand que celui du Pacifique Nord.

Une période d'adaptation octroyée à divers secteurs

L'interdiction envisagée ne concerne justement que ces microplastiques "ajoutés", qui dans certains produits remplacent des produits auparavant naturels. C'est notamment le cas des microbilles dans les cosmétiques exfoliants, qui sont venues se substituer à l'amande moulue, à la noix de coco, aux graines d'olive, etc. Les nouvelles mesures imposeront une refonte de leur conception.

« L'évaluation de l'ECHA a montré que les microplastiques ajoutés intentionnellement sont les plus susceptibles de s'accumuler dans l'environnement terrestre, car les particules se concentrent dans des boues d'épuration fréquemment utilisées comme engrais. Une proportion beaucoup plus faible de ces microplastiques est rejetée directement dans l'environnement aquatique », explique l'agence.

Les restrictions ne s'appliqueront en revanche pas aux microplastiques dérivant de l'usure de produits contenant du plastique tels que les pneus ou les vêtements, ou de la perte de granulés, dont quelque 173.000 tonnes sont rejetées dans l'environnement chaque année. En outre, si les produits de nettoyage devraient être concernés dès la première année d'entrée en vigueur, "d'autres secteurs se verront accorder 2 à 6 ans" pour s'adapter, regrette Rethink Plastic Alliance, qui globalement salue pourtant la proposition de loi.

 Des dizaines de mois avant l'entrée en vigueur

« La proposition fera l'objet d'une consultation publique cet été, suivie d'évaluations économiques, sociales et des risques, puis d'un vote d'experts gouvernementaux au sein du comité secret de REACH », souligne le réseau. Puis, « la Commission européenne disposera de trois mois pour préparer la législation. Ensuite, cela pourrait prendre jusqu'à huit mois pour que les restrictions d'utilisation entrent en vigueur », ajoute le quotidien britannique The Guardian.

La législation s'inscrit dans la stratégie européenne sur le plastique, et vient compléter la directive sur les articles à usage unique. En France, les microbilles de plastique dans les produits d'hygiène sont interdites depuis le 1er janvier 2018.

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