Transition énergétique : après la prime à la casse, coup de rabot sur les aides à la rénovation

Par Dominique Pialot  |   |  800  mots
Le crédit d'impôt pour la transition énergétique transformé en prime indexée sur les revenus et l'efficacité des travaux réalisés (Crédits : Mike Fouque)
Le ministère de la Transition écologique a officialisé ce 9 août la révision des aides à la rénovation énergétique pour les ménages qu’avait annoncée Édouard Philippe dans son discours de politique générale le 12 juin dernier. Cette refonte intervient une semaine après l’entrée en vigueur de la nouvelle prime à la conversion automobile. Dans un cas comme dans l’autre, cette évolution est destinée à rendre ces mesures plus justes. Et surtout moins onéreuses pour les finances publiques.

Transformer le crédit d'impôt à la transition énergétique (CITE), cela faisait au moins un an que le gouvernement l'avait prévu, puisque cela figurait déjà dans le plan présenté par Nicolas Hulot en juillet 2017. Le projet avait de nouveau été évoqué par Édouard Philippe dans son discours de politique générale au sortir du grand débat, essentiellement pour remédier à une trop grande complexité et à une forme d'injustice.

Les nouvelles modalités, qui entreront en vigueur en deux temps, en 2020 pour les ménages les plus modestes puis en 2021 pour les quartiles suivants, viennent seulement d'être officialisées. Désormais, le CITE sera remplacé par une prime versée par l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Outre qu'elle sera versée au moment de la réalisation des travaux, ce qui évitera aux ménages de devoir faire l'avance des frais comme c'est le cas pour le CITE, son montant ne sera plus calculé sur la base des travaux, mais de leur efficacité énergétique, des montants forfaitaires de 200 à 11.000 euros devant être définis par type de travaux. Autre nouveauté : cette prime sera versée sous condition de ressources.

D'après le quotidien Les Echos, les 20% des ménages les plus aisés  n'auront plus droit à aucune aide. Ce sont pourtant eux qui percevaient près de 50% des deux milliards de dépenses que représente le CITE, instauré en 2005. Cette disposition n'a pas été confirmée par le ministère. Les 40% des ménages les plus modestes devraient bénéficier de cette mesure dès 2020, les quatre déciles suivants dès 2021.

Concertation avec les professionnels

De façon générale, le ministère a tenu à souligner que "L'ensemble des modalités du dispositif, le périmètre des travaux qui seront aidés et le barème des aides envisagé pour la prime, fait l'objet d'une concertation avec les professionnels et les acteurs du secteur, qui vient d'être lancée", précisant "qu'aucune décision" n'était "arrêtée à ce stade".

Officiellement, "L'objectif de cette réforme est de massifier la rénovation énergétique des logements en rendant les aides plus simples et plus efficaces".

S'il semble socialement juste que les ménages les plus aisés ne soient plus ceux qui bénéficient en priorité des Aides - notamment en raison de leur complexité qui les rend plus difficiles d'accès à certaines catégories de la population - semble socialement justifié. En revanche, on peut s'étonner que l'efficacité réelle des travaux n'ait jusqu'à présent pas été prise en compte pour déterminer le montant du crédit d'impôt...

900 millions d'euros pour la prime à la casse

Ces évolutions des aides à la rénovation énergétique sont présentées une semaine après l'entrée en vigueur de la nouvelle prime de conversion automobile. Victime de son succès, cette « prime à la casse » avait séduit plus de 220.000 propriétaires d'automobiles à fin juin, ce qui équivaut, en rythme annualisé, à 450.000 dépôts de dossiers. Et, surtout, un coût de 900 millions d'euros alors que le budget alloué se limité à 596 millions.

Là aussi, les critères de revenus sont affinés, puisque le montant de la prime est fonction du revenu fiscal de référence, avec une limite fixée à 13.489 euros, les 50% de ménages les plus aisés et les personnes morales étant désormais exclues du dispositif. Les modifications portent également sur les véhicules achetés, avec une plus grande exigence quant aux émissions de CO2 par kilomètre, qui passent de 123gCO2 à 117gCO2 (pour mémoire, à compter de 2021, les véhicules neufs mis sur le marché devront respecter un plafond de 95gCO2), et l'exclusion des véhicules les plus luxueux - au-dessus de 60.000 euros TTC. Jusqu'à présent, la prime était très utilisée pour acheter des véhicules diesel d'occasion, alors même qu'ils seront bientôt bannis des centres-ville...

Hausse de la taxe carbone suspendue

Mais son montant baisse pour toutes les catégories, et la contrainte budgétaire est clairement à l'origine de cette révision.

Ces difficultés budgétaires ne sont pas sans lien avec la suspension de la hausse de la taxe carbone décidée en décembre dernier pour tenter d'enrayer le mouvement des gilets jaunes. Les 150 Français tirés au sort pour composer la Convention citoyenne qui devra plancher à compter de septembre sur les mesures devant permettre à la France d'atteindre ses objectifs de neutralité carbone en 2050 et de baisse de 40% de la consommation d'énergies fossiles d'ici 2030, préconiseront-ils de renouer avec cette hausse ? On le saura en principe d'ici mi 2020, puisque cette Convention doit se réunir sur une durée de six mois à compter de septembre.