Economie d'énergie : la startup Green Heat propose de réchauffer les piscines avec leur propre chaleur

Si la récupération de chaleur est connue, elle n'est pas forcément proposée à l'échelle d'un centre aquatique. Une startup française propose justement de réchauffer l'eau froide entrante d'une piscine avec celle qui en sort. Avec la hausse du coût de l'énergie qui conduit à des fermetures de piscines dans certaines villes, la toute jeune entreprise commence à multiplier les marques d'intérêt.
Hugo Durou d’EHTech et Jean Sobocinski d’Evolsys.
Hugo Durou d’EHTech et Jean Sobocinski d’Evolsys. (Crédits : DR)

C'est une information que peu de personnes connaissent. Dans les centres aquatiques, la réglementation impose de renouveler l'eau des bassins, à raison de 30 litres par baigneur, comme préconisé par les agences régionales de la santé. Dans les faits, le taux de renouvellement atteint même généralement 50 litres voire même jusqu'à 75 par baigneur. Techniquement, c'est donc de l'eau froide qu'il faut réchauffer pour ensuite injecter dans la piscine. Tandis que de l'eau à 28 degrés est, elle, directement rejetée dans les canalisations d'eaux usées... Un gâchis énorme, qui selon la Cour des comptes, entraîne en moyenne un déficit pour chaque centre aquatique de 640.000 euros par an.

Grâce à son savoir-faire et à différents brevets déposés, une joint-venture unissant une entreprise dans le Nord et une société basée à Toulouse, commercialise un échangeur thermique. Via une pièce de métal, le système va récupérer la chaleur sortante pour mettre la nouvelle eau entrante à température. Le système équipe déjà 17 piscines en France (en Bretagne, à Lyon, Metz, à Nancy, en région parisienne, bientôt à Hénin-Beaumont) et un site industriel. La nouvelle société espère équiper ainsi 170 sites d'ici cinq ans, sachant qu'il existe près de 4.000 piscines en France. Tout en ne perdant pas de vue pour autant le potentiel dans l'industrie et ailleurs en Europe...

Proposé "as-a-service"

Née du rapprochement Evolsys, distributeur nordiste de systèmes de récupération de chaleur basé à Sainghin-en-Mélantois et la startup toulousaine EHTech qui a conçu un système de récupérateur de chaleur des eaux de douche, Green Heat a commencé par équiper un site industriel, Tank Service, spécialisée dans le nettoyage de citerne à Saint-Pol-sur-Mer (59) et qui avait besoin de 80 m3 d'eau par jour à 80°C. Puis a installé ce système en 2019 à la demande de la collectivité de Foix (6.800 m3 d'eau de renouvellement de bassin), ce qui a représenté un coût entre 50.000 et 70.000 euros.

Un budget qui n'est pas à portée de toutes les structures devant gérer une piscine... « Tout dépend de la taille de la piscine mais nous estimons qu'en fonction du nombre de baigneurs, le retour sur investissement est estimé entre deux et dix ans », note Jean Sobocinski d'Evolsys. « En consultant près d'une centaine de piscines, nous nous sommes rendus compte que beaucoup d'entre elles n'avaient pas forcément les lignes budgétaires. D'autres avaient des doutes sur les réelles économies d'énergies qu'on leur vante depuis trente ans ».

Convaincu du potentiel de son invention, Green Heat a donc proposé cette prestation « as-a-service », avec étude, investissement, pose, exploitation et maintenance. A savoir que la startup finance l'installation à son compte et va se rémunérer via la vente (à prix fixe pour de 5 à 10 ans) de l'énergie récupérée à la collectivité. Sur des énergies renouvelables, il est assez rare que le bénéficiaire n'ait du coup pas un euro à débourser au départ, avec un prix inférieur ou égal aux énergies fossiles.

Garder l'efficacité de rendement dans le temps

L'investissement initial est, dans ce cas, couvert pour moitié environ par les certificats d'économie d'énergie (CEE) et le reste à charge est alors supporté par la revente de l'énergie délivrée à la collectivité, sur toute la durée du contrat. « Par exemple, là où une collectivité utilisait 100% de gaz, elle va alléger la facture avec cette récupération d'énergie par exemple », poursuit Jean Sobocinski. D'après les données récupérées des premiers systèmes installées, les piscines baissent en moyenne leurs besoins en énergie fossile de 40%. Sachant que la législation imposera un mix d'énergie renouvelable à 32% pour le tertiaire en 2030.

Techniquement, les piscines sont équipées du système baptisé Obox P, mis au point à Toulouse, fabriqué en France, breveté 8 fois. « La difficulté dans la récupération de chaleur sur les eaux usées, c'est que par définition, elles sont sales. Le challenge est donc de garder la même efficacité de rendement (environ 75%) dans le temps », explique Hugo Durou d'EHTech. « Un système de nettoyage automatique va donc éviter que les échangeurs ne s'encrassent. Si beaucoup de solutions existent pour l'eau propre, nous sommes aujourd'hui les seuls à pouvoir travailler avec les eaux usées. »

Les relevés des machines déjà installées montrent qu'une piscine de 200.000 baigneurs peut ainsi récupérer une centaine de méga watt heures par an. Pour commencer les investissements, Green Heat mène actuellement une levée de fonds actuelle, sans doute entre 500.000 et 700.000 euros. D'après les projections d'ici 2026, les revenus récurrents de la revente d'électricité devraient représenter à terme 50% du chiffre d'affaires global. Elle a été soutenue par la plateforme régionale Invest-Innov, accélérateur pour investir et lever des fonds en région Hauts-de-France.

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