Air France quitte Orly : réactions mitigées des élus et des acteurs économiques du sud francilien

Par Mathieu Viviani  |   |  844  mots
Pour justifier son départ, Air France évoque « la chute structurelle de la demande » sur ses lignes intérieures en partance d'Orly. (Crédits : Charles Platiau)
La décision d’Air France d’arrêter en 2026 ses vols intérieurs en partance d’Orly a surpris de nombreux élus et acteurs économiques d’Ile-de-France. Inquiétude pour l’emploi, menace sur le développement de l’aéroport, choix de raison, ils témoignent.

L'annonce est tombée comme un couperet. Dans un communiqué publié ce mercredi matin, la compagnie Air France a confirmé l'arrêt en 2026 de ses vols internes en partance de l'aéroport d'Orly, située dans le département du Val-de-Marne (banlieue sud de l'Ile-de-France).

Si le processus va jusqu'au bout, Air France opérera donc « l'ensemble de ses vols domestiques et internationaux au départ de son hub de Paris-Charles de Gaulle », selon les mots du communiqué. En contrepartie l'offre de vols Air France internes sera renforcée au départ de Roissy, et Transavia, filiale low cost de la compagnie nationale, renforcera son offre sur Toulouse, Marseille et Nice au départ d'Orly.

Pour justifier cette décision, Air France évoque « la chute structurelle de la demande sur le réseau domestique point-à-point » liée notamment au « développement de la visioconférence, la réduction des déplacements professionnels » sur le marché intérieur et « le report vers le train ». En d'autres termes, les lignes domestiques en partance d'Orly étaient de moins en moins rentables.

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Inquiétude sur l'emploi

Concernée directement en tant que maire d'Orly, Imène Souid-Ben Cheikh (divers gauche), « regrette cette décision » dont elle a pris connaissance ce matin via un coup de fil de la direction d'Air France. Si elle entend « les considérations économiques » de la compagnie, l'édile s'inquiète de l'impact de cette décision sur l'emploi local. « J'ai eu la garantie que tous les emplois actuels d'Air France à l'aéroport d'Orly seront préservés. Mais nous resterons particulièrement attentifs à ce que cet engagement soit respecté », explique l'élue.

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Près de 600 personnels au sol d'Air France sont concernés par ce choix stratégique. Ils se verront proposer un « plan mobilité » pour rejoindre le hub de Charles de Gaulle, avec zéro « départ contraint », promet la compagnie. Des mesures qui pour le moment n'ont pas calmé l'inquiétude des représentants syndicaux des salariés d'Orly et des escales concernées en région.

« Une décision comme celle-ci, ce n'est jamais bon pour les commerces locaux », souligne par ailleurs Alain Martinez, de la CPME Val-de-Marne. Il poursuit : « En dehors d'Air France, il y a de nombreux emplois autour de l'aéroport d'OrlyJe pense notamment à l'hôtellerie, très utilisée par les personnels de vols de la compagnie et la clientèle affaires. »

Autre sujet, le représentant de l'organisation patronale ne trouve pas de cohérence entre l'arrivée à Orly de la ligne de métro 14 en juin 2024, « qui va considérablement faciliter son accès » et cette décision. « J'entends les raisons économiques d'Air France, mais cette décision pose tout de même la question du développement économique futur de cet aéroport historique », conclu-t-il.

Un bon choix de la part d'Air France, selon Medef

Un point de vue que ne partage pas Bastien Brunis, porte-parole du Medef et président de l'organisation patronale dans le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis.

Il explique : « Lorsqu'une activité n'est plus rentable, il faut savoir évoluer, c'est aussi ça le monde de l'entreprise. Il vaut mieux des emplois pérennes à Roissy plutôt que de les voir disparaître dans quelques années à Orly. Si on prend un peu de hauteur, c'est une bonne chose qu'Air France, premier employeur d'Ile-de-France, développe le hub de Roissy. »

Et d'ajouter que la montée en puissance de Transavia à Orly est « au contraire un élément structurant de son développement futur ». De plus, Transavia incarne le « low cost à la française, avec un droit du travail solide et des conditions d'exercices meilleures que chez les autres compagnies européennes ».

« Une décision absurde », sans consultation des représentants locaux

Pour François Durovray, président Les Républicains du Conseil départemental de l'Essonne, cette décision est tout bonnement « une erreur ». En colère, il déplore déjà la méthode : « Nous avons appris la nouvelle par voie de presse ce matin, sans qu'aucune consultation avec les élus et acteurs économiques locaux aient eu lieu. Ce n'est pas normal car d'habitude on est consulté en amont. »

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Il ne partage pas non plus l'argument économique d'Air France : « Orly est devenu un aéroport de référence pour les passagers en provenance de l'ouest de la France. Pour moi, on déshabille Orly pour habiller Roissy. Mais la réalité est qu'Air France veut sauver son hub de Charles-de-Gaulle qui ne marche pas très bien.»

Même tonalité de la part de Robin Reda, député Renaissance de la 7e circonscription de l'Essonne, qui regrette la perte du « berceau historique d'Air France ». Il déplore aussi « une décision absurde » alors que l'aéroport d'Orly « gagne en attractivité » et « va devenir l'aéroport national le mieux connecté à Paris grâce à la ligne 14 ».