Comment les marques font face à la crise

C'était en juillet dernier, la crise financière n'avait pas encore fait trembler la planète, mais un chiffre assombrissait déjà les perceptives de croissance des entreprises. Au premier semestre 2008, selon les données de l'institut Iri France, le volume des ventes des grandes et moyennes surfaces enregistrait une baisse de 0,7 %. Du jamais vu de mémoire de statisticien. Les réactions ont été immédiates. Pour enrayer la chute de leur marché respectif et sauver le soldat « pouvoir d'achat », Danone lançait début septembre son Eco-Pack, six yaourts vendus au prix symbolique de 1 euro. Anticipant le recul des cours du blé, Panzani annonçait à grand renfort de publicité une baisse de ses tarifs de 10 % à 15 % et les ténors de la grande distribution jouaient la carte de la surenchère promotionnelle. Tous croisaient les doigts pour que cette manifestation de bonne volonté, amplifiée par le recul du prix du baril de pétrole, ramène les consommateurs à la raison et les éloigne du hard discount. Mais leurs espoirs ont été anéantis par la crise financière d'octobre qui fait dire aux directeurs marketing interrogées par l'institut LH2 (*) que le spectre de la déconsommation rôde toujours. Seuls 31 % d'entre eux pensent que la crise n'aura pas de répercussions négatives pour leur entreprise. « La crise apparaît comme un événement majeur susceptible de dessiner un paysage nouveau dans les années qui viennent », avance Jean-François Levionnois, PDG de l'institut LH2.nouvelles opportunitésPas question en ces temps difficiles de sortir l'artillerie lourde. Les directions marketing prêchent au contraire pour la prudence. Pour autant, une moitié des responsables interrogés par l'institut jugent que la crise va créer de nouvelles opportunités et que l'innovation ne doit pas être sacrifiée sur l'autel de la rentabilité immédiate. Ceux-là défendent une idée simple : la différenciation reste le meilleur moyen pour inciter le consommateur à acheter un produit plutôt qu'un autre. « Dans un contexte de crise, les marques doivent donner envie et donc continuer à faire de la différenciation tout en cherchant à limiter l'impact de la hausse des matières premières sur le prix des produits, explique Yvan Bonneton, directeur marketing de la division détergents d'Henkel France. Nous avons donc lancé pour chacune de nos marques un audit des valeurs qui va nous permettre d'ajuster les mix-marketing en fonction de leur positionnement réciproque. » Et le cas échéant de réorienter les investissements avec l'espoir de sortir le consommateur de la logique de privation. Gilles Pacault, l'ancien directeur de la communication de Nestlé, aujourd'hui vice-président de Prodimarques, est formel : « Alors que c'est le système marchand dans son ensemble qui est contesté, les marques vont devoir maîtriser les prix, proposer des innovations raisonnables ou encore vendre quelque chose qui s'inscrit dans les nouvelles valeurs sociétales, comme le bio et l'équitable. »arbitrages à l'heure des arbitrages, c'est bien la valeur d'usage de la marque qui est jugée. « Alors que Les 2 Vaches [la marque bio de Danone en France, Ndlr] sont 30 % plus chers que les yaourts conventionnels, notre croissance sur un an est supérieure à 50 %. Ce qui veut bien dire que les consommateurs reconnaissent la supériorité du bio. Certes, ils n'en mangent pas tous les jours, mais ils sont de plus en plus nombreux à s'offrir ce petit plaisir », commente Anne Thevenet-Abitbol, directrice prospective et nouveaux concepts du groupe Danone. Bref, comme le présentent les marketeurs, la crise contribue à un changement profond du modèle de la consommation. Ils sont ainsi plus de huit sur dix à penser que les Français vont basculer d'une consommation immédiate du « tout, tout de suite » à une consommation tournée vers l'essentiel. « L'ensemble de la société est aujourd'hui enserré par trois crises de natures différentes, mais sous certains aspects indissolublement liées dans leur conséquence : une crise du pouvoir d'achat, une crise financière et une crise environnementale. Dans ce contexte unique, de nombreuses entreprises ont compris que seule une innovation de rupture, qui dans certains cas constituera à rendre désirable et tendance une offre low-cost, et une communication adaptée leur permettra de conserver leur leadership. Sinon, les challengers s'empareront de la nouvelle donne ?psycho-économique? pour gagner des parts de march頻, analyse Jean-François Levionnois. D'autant que de l'avis de tous, la crise passée, les changements de comportements vont perdurer. À n'en pas douter cette période offre pour le marketing, une réelle opportunité : créer pour l'entreprise de la valeur durable? (*) Sondage Internet réalisé par l'institut LH2 du 15 au 22 octobre 2008 sur un échantillon de 106 responsables du marketing,
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