Les filiales des grandes banques françaises au régime sec

Les résultats annuels des grandes banques françaises ont confirmé les difficultés de leurs filiales de gestion d'actifs. « C'est dans la continuité du second semestre 2007, à la suite de l'éclatement de la crise du crédit », rappelle Gilles Glicenstein, administrateur directeur général de BNP Paribas Investment Partners (BNPP IP). BNP PIP, Crédit Agricolegricole Asset Management (CAAM), Natixis Global Asset Management (NGAM) et Société Généralecute; Générale Asset Management (SGAM) ont toutes enregistré une baisse de leur produit net bancaire (PNB). Si CAAM s'en sort plutôt bien avec un recul de 7,6 %, c'est loin d'être le cas de SGAM, dont le PNB chute de 63,1 % (voir tableau ci-contre). « La gestion d'actifs étant un métier de stocks, la contraction du PNB s'explique en grande partie par la baisse des encours due à l'effet march頻, indique Pierre Servant, directeur général de NGAM. Sur 2008, les actifs de BNPP IP, CAAM, NGAM et SGAM (filiales comprises) reculent respectivement de 18,2 %, 12,85 %, 24 % et 24,7 %. L'industrie a subi le double effet de la crise. Un effet marché négatif exceptionnellement fort. La chute des Bourses a entraîné une baisse des encours puisque la valeur des actifs diminue et, par ricochet, une baisse des revenus ? les commissions de gestion étant indexées sur les actifs. De même, avec des marchés en berne, les montants de frais de surperformance sont faibles, voire nuls. Ces quatre maisons enregistrent aussi des rachats plus ou moins importants qui, comparés à l'effet marché, restent marginaux. Si les produits actions, alternatifs, à performance absolue, ont été délaissés, le monétaire régulier a collecté, « signe d'une forte aversion pour le risque », constate Yves Perrier, directeur général de CAAM. Mais ces produits dégagent de faibles marges. S'ajoute un coût du risque en hausse qui devient un sujet majeur pour les sociétés de gestion (lire entretien). En revanche, les quatre sociétés de gestion ont maîtrisé leurs charges en raison, entre autres, d'une diminution des rémunérations variables. Quant au coefficient d'exploitation, il s'établit à 48 % pour CAAM, loin devant ses concurrentes.Niveau d'actifs inférieur Pour 2009, la situation risque d'être encore plus difficile, les sociétés de gestion s'appuyant sur un niveau moyen d'actifs sensiblement inférieur. Pour Gilles Glicenstein, « si les marchés d'actions continuent de baisser, cela sera dur en termes de revenus. L'objectif est, dans un premier temps, de faire aussi bien que l'an pass頻. Même sentiment chez Pierre Servant qui anticipe une baisse comprise entre 15 % et 20 % du résultat opérationnel. Le contrôle des dépenses se poursuivra, et tout ce qui permettra de réaliser des économies (réduction des frais annexes, cession d'activité, rationalisation des gammes, etc.) sera entrepris. « Cela ne signifie pas qu'il n'y aura pas d'embauche, rassure Gilles Glicenstein. Elles seront plus ciblées. Nous faciliterons aussi la mobilité interne du personnel vers les activités que nous souhaitons renforcer. »Si aucune maison ne déclare remettre en cause sa stratégie de développement, elles se veulent toutes pragmatiques et n'hésiteront pas à revoir leur copie en cas de dégradation de la conjoncture. En attendant, « nous continuerons à élargir la gamme de nos expertises avec des innovations produits développées en internes ou par l'acquisition de petites structures, déclare Pierre Servant. Nous envisageons aussi d'étendre la distribution et la production de fonds en Europe, Asie, Moyen-Orient ». Ce spécialiste reste conscient que cela se fera avec des contraintes financières plus lourdes et à dépenses constantes. Il se veut toutefois optimiste et n'adhère pas au discours consistant à dire que « la gestion d'actifs est condamnée. Il y aura toujours des assureurs, des institutionnels, des particuliers avec des besoins d'investissement à satisfaire. Et la problématique du financement des retraites constitue une opportunité de long terme pour l'industrie. » besoins d'investissementPar ailleurs, il pense que l'architecture ouverte profitera de cette crise, les investisseurs devenant plus exigeants sur la capacité des gérants à générer de la performance dans cet environnement de marché difficile. « Les clients recherchent de la spécialisation à travers de nouveaux produits et en ayant accès à de nouveaux marchés comme les émergents », indique Gilles Glicenstein. C'est ce que propose l'approche multiboutique de BNPP IP, qui a d'ailleurs bien résisté dans la crise. D'autres acquisitions ou partenariats sont-ils possibles?? « À condition que cela développe notre expertise, notre offre et notre présence à l'international, répond-il. Si le but est uniquement d'apporter une sécurité financière, cela n'a d'intérêt ni pour nous ni pour nos clients. »D'autres maisons ont apporté une réponse plus radicale à la crise. Credit Suisse a cédé sa gestion traditionnelle à Aberdeen AM. Threadneedle a racheté les activités de Standard Chartered. Quant à Société Généralecute; Générale (SG), elle a créé un joint-venture entre CAAM et SGAM, détenu à 70 % par la Banque verte (lire encadré). Pour Frédéric Oudéa, directeur général de SG, cette opération « annonce un mouvement de concentration en Europe ». Peut-être. Mais il a aussi fait le choix de se passer d'un métier. Est-ce parce qu'il n'est pas assez rentable?? Il le restera, sous réserve que cette crise ne dure pas trop longtemps.
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