La santé des compagnies aériennes s'aggrave encore

C'est le plus grand défi que les compagnies aériennes aient jamais eu à relever. » Hier, à Kuala Lumpur en Malaisie, en marge de l'assemblée générale de l'Association internationale du transport aérien (Iata), le directeur général de British Airways, Willie Walsh, n'y est pas allé par quatre chemins pour décrire l'ampleur de la crise qui frappe le secteur. Personne ne l'a contredit. Surtout pas Giovanni Bisignani, directeur général de l'Iata, qui a prédit 9 milliards de dollars de pertes pour ses membres en 2009 (dont 3,3 milliards pour les compagnies asiatiques et 1,8 milliard pour les européennes), après 10,4 milliards en 2008, un dernier chiffre gonflé hier de 2 milliards. L'estimation 2009 est donc deux fois plus lourde que celle prévue il y a six semaines, lorsque l'Iata avait déjà doublé sa prévision de déficit. Cela porterait à 48 milliards de dollars les pertes cumulées depuis 2001. Voire plus si la baisse de la demande empire. Ce qui n'est pas exclu si l'impact de la grippe A s'aggrave ou si le pétrole poursuit la hausse de ces dernières semaines.voyages d'affaires en baisseResté longtemps autour de 40 dollars, le baril avoisine les 70 dollars. L'Iata table sur un prix moyen du baril de brent de 56 dollars en 2009. Cela allégerait la facture carburant de 59 milliards, mais ne suffirait pas à soulager les compagnies. La dégringolade du chiffre d'affaires est trop forte : « 80 milliards de dollars [? 15 % par rapport à 2008, Ndlr] vont s'évaporer cette année », déplore Giovanni Bisignani. Le trafic passagers devrait dégringoler de 8 %, et celui du fret de 17 %. « La vidéoconférence devient notre concurrent le plus sérieux », explique le patron de l'Iata. Et les entreprises qui font encore voyager leurs collaborateurs les privent de la très lucrative classe affaires. La recette unitaire chute de facto. « Après le 11 septembre 2001, les recettes n'ont baissé que de 7 %. Et, malgré un retour à la croissance, il nous avait fallu trois ans pour revenir aux niveaux antérieurs », rappelle Giovanni Bisignani. Le secteur pourrait rester trois ans dans le rouge.Néanmoins, les gros opérateurs bénéficiant d'une trésorerie meilleure qu'en 2001, l'Iata n'anticipe pas de banqueroutes majeures. Préserver de la trésorerie est la priorité absolue des transporteurs, et l'Iata craint donc des annulations ou des reports de livraisons d'avions. L'association prévoit une baisse des livraisons de 30 % en 2010. « Une nouvelle fois les commandes passées en haut de cycle doivent être livrées en période de récession », explique Giovanni Bisignani. Près de 4.000 avions doivent être livrés durant les trois prochaines années, l'équivalent de 17 % de la flotte actuelle.rapprochementsL'Iata veut profiter de la crise pour pousser toute la chaîne à faire des efforts, alors qu'en dix ans les transporteurs ont accru leur productivité de 71 %. Objectif : réduire les factures des aéroports, des services de navigation aérienne, des agents de voyages et des systèmes de réservation de billets (GDS). Le personnel est prié de ne pas réclamer de hausse salariale. « Tout le monde doit contribuer », insiste Giovanni Bisignani, qui craint « une crise de cash » en cas de récession longue. Pour lui, l'un des remèdes réside dans une libéralisation accrue du secteur, encore très réglementé. Notamment en matière de rapprochements transfrontaliers, souvent interdits par les États réticents à voir leur pavillon national passer aux mains d'une compagnie étrangère.
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