Le taux zéro enfonce un peu plus le franc suisse

Jadis, les Suisses baissaient leurs taux pour calmer la fièvre sur leur franc, valeur refuge par excellence du marché des changes. Aujourd'hui, ils utilisent l'arme des taux pour contrer une crise économique et financière inédite, quitte à envoyer leur prestigieuse monnaie au tapis. Hier, la Banque Nationale Suisse (BNS) a annoncé la quatrième salve de baisse de ses taux depuis le 8 octobre, qui porte la réduction à 250 points de base en deux mois.taux à la japonaise La fourchette du Libor 3 mois de la BNS, qui fait office de taux directeur, a été abaissée jeudi d'un nouveau cran à 0 % -1 %, soit un taux moyen de 0,5 %. Un taux à la japonaise qui en dit long sur les craintes des responsables helvétiques. Traditionnellement, la banque centrale pilote ce taux au milieu de la fourchette du Libor. Elle s'est dotée aujourd'hui d'une marge de man?uvre pour le faire tomber à zéro. Rien d'étonnant dans ces conditions que le franc suisse fasse grise mine. Après avoir chuté à un plancher historique face à l'euro en octobre 2007, en pleine vogue du « carry trade » (les stratégies de portage consistant à jouer sur les écarts de rendements), pour tomber jusqu'à 1,68, il avait rebondi dès le début de leur débouclage jusqu'à 1,44 pour 1 euro en octobre. Hier, le « swissie », son surnom anglo-saxon, ne valait plus que 1,5810. Face au dollar, remonté au-dessus de 1,20, le franc a perdu 18 % de sa valeur depuis la mi-juillet, au moment ou le billet vert a interrompu six ans de dérive quasi ininterrompue.Pendant ce temps, le yen, avec qui il partageait le rôle de victime des stratégies à effet de levier, caracole, au grand dam des autorités nipponnes, ce qui se traduit par un recul du franc suisse par rapport au yen de plus de 15 %. Comment expliquer le divorce entre ce couple de monnaies qui évoluaient de concert, à l'époque pas si lointaine où les spéculateurs les empruntaient à bon compte pour en investir le produit sur des monnaies à hauts rendements ? D'abord parce que le swissie a été un vecteur du « carry trade » nettement moins important que le yen, monnaie de la deuxième puissance économique mondiale, qui est aussi le plus gros exportateur de capitaux de la planète. Ensuite parce que la Confédération a administré une thérapie de choc sur ses taux, alors que la Banque du Japon, privée de marge de man?uvre, n'a concédé qu'une détente symbolique de son taux directeur ramené de 0,5 % à 0,3 % le 21 octobre. Enfin parce que le système bancaire suisse, éminemment important rapporté au PIB, apparaît beaucoup plus fragile que celui du Japon. Deux des fleurons de la finance helvétique suscitent des inquiétudes, à commencer par UBS, qui a déjà bénéficié de l'injection de fonds publics et dans une moindre mesure le Credit Suisse.C'est ce triptyque qui sous-tend la faiblesse du franc suisse et qui lui a fait perdre le statut de valeur refuge dont il avait bénéficié pratiquement tout au long du cycle monétaire qui a suivi l'abandon du système de changes fixes en 1971 et l'entrée dans l'ère des changes flottants. C'est aussi la rançon à payer pour avoir été avant tout une monnaie financière. n++BSD ++PasSupprimerBalise balise systèmene pas supprimer++BSF ++
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