Les jeunes de Hull, dans le nord-est de la Grande-Bretagne, sont en première ligne

« Trois », estime Suzy. « Deux », calcule Keith. Pour ces deux jeunes gens de 17 ans et 18 ans, voilà le nombre de leurs amis qui ont un emploi. Les autres ? Ils sont presque tous au chômage. Ou pire, ils ne sont même pas enregistrés au Job Center local (l'équivalent de notre Pôle emploi), ayant déjà quitté l'école mais ne suivant ni formation ni stage. Dans le jargon de l'administration britannique, ce sont des NEETs (Not in Education, Employment or Training).Hull, où vivent Keith et Suzy, est la capitale britannique du chômage des jeunes. Dans cette ville du nord-est de la Grande-Bretagne, où la pêche et l'industrie ont périclité dans les années 1980, le phénomène n'a jamais vraiment disparu. petits jobs pris d'assautMais depuis un an, il a grimpé de 50 %. Et il existe dans toute la Grande-Bretagne. Le chômage des moins de 25 ans, qui était de 13,8 % il y a un an, a bondi à 18,4 %. Un demi-million de jeunes étaient sans emploi l'an dernier, mais il devrait y en avoir 1 million d'ici à l'année prochaine, selon une étude de Centre for Cities, une association spécialisée sur les problèmes urbains.Tant que le marché du travail n'était pas sous pression, ces jeunes pouvaient facilement passer de petits boulots en petits boulots. Mais ces jobs ont soudain disparu. L'expérience de Mark, 17 ans, en dit long : « J'ai posé ma candidature pour un emploi d'éboueur. Mais il y a eu 1.460 candidats pour 20 postes. J'ai eu un entretien d'embauche, mais je n'ai pas été retenu. »Suzy, Keith et Mark sont pourtant plutôt chanceux. Ils font actuellement partie d'un nouveau programme de formation, intitulé Cat Zero, qui se termine par deux semaines de navigation sur un magnifique yacht. Pendant six semaines, ils suivent une série d'apprentissages : travail du bois et du métal, premiers secours, sécurité alimentaire, gagnant au passage quelques diplômes de base? L'idée vient de Jim Dick, ancien directeur d'une entreprise pharmaceutique locale désormais à la retraite. Lors de la course à la voile Clipper Race il y a deux ans, il avait recruté 10 jeunes en difficulté, chacun participant à une partie de l'aventure. « Nous les avons vus changer devant nos yeux. À 3 heures, quand il s'agissait de hisser une voile, ces jeunes étaient aussi efficaces que n'importe qui d'autre. » Il a alors eu l'idée de rendre le projet permanent, et a réussi à convaincre les autorités locales d'acheter un bateau et de financer les formations. Le programme a commencé en janvier et apporte des résultats encourageants. Sur 43 jeunes qui l'ont déjà suivi, les trois quarts ont trouvé un emploi ou commencé une formation.redonner confianceLe meilleur exemple est sans doute celui de Maisy Adams, 18 ans. En conflit avec sa mère, vivant dans un hôtel, elle n'a travaillé qu'une seule journée depuis qu'elle a quitté l'école, il y a deux ans. « La semaine sur le bateau a été la meilleure de ma vie, affirme-t-elle. Et le programme m'a donné énormément de confiance en moi. » Elle a maintenant entamé une formation d'un an dans la soudure et la machinerie, et elle s'est remise à parler avec sa mère.Mais pour un cas comme celui de Maisy, combien de jeunes galèrent ? Le programme Cat Zero va recevoir 450 personnes sur trois ans, alors qu'environ 1.200 jeunes sont des NEETs en permanence à Hull. John Robinson, un conseiller municipal, ne cache pas son inquiétude, critiquant la mauvaise qualité des écoles secondaires. « Autrefois, les gens n'avaient qu'à marcher jusqu'au port pour trouver un emploi. Cela a eu un impact sur l'ambition du système scolaire. »Depuis avril, la ville a mis sur pied un fonds temporaire de 15 millions de livres (17 millions d'euros) pour tenter de faire face à l'urgence sociale. L'argent, dont le tiers a été dépensé en trois mois, sert à financer des formations ou des apprentissages pour des chômeurs de courte durée. Mais Malcolm Relph, directeur de la stratégie économique de la ville, reconnaît qu'il ne s'agit pas d'une solution de long terme, particulièrement pour les plus jeunes. « Si nous n'arrivons pas à rattraper les jeunes rapidement, nous allons nous retrouver avec une nouvelle génération de chômeurs. »Éric Albert, envoyé spécial à Hull (nord-est de la Grande-Bretagne)
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