12,6 milliards d'argent public pour un résultat douteux

Même si le président de la République a appelé hier de ses v?ux une « rénovation de la politique menée par l'État outre-mer », les mauvaises habitudes ont visiblement la vie dure. Qu'on en juge. Depuis le début du conflit en Guadeloupe, le gouvernement a promis 190 millions d'euros pour les diverses mesures d'urgence (mise en ?uvre anticipée du RSA, revalorisation des aides au logement, baisse du prix des carburants, billets d'avion à coût réduit?). Le projet de loi pour l'outre-mer (voir ci-dessous) prévoit 100 autres millions de crédits supplémentaires chaque année pour favoriser le développement des entreprises locales. Le plan de relance de l'État, quand à lui, a réservé 215 millions pour les nouveaux investissements outre-mer.Cet argent public viendra s'ajouter aux quelque 16,5 milliards d'euros d'effort total de l'État en direction de l'outre-mer en 2009 selon les sénateurs UMP Éric Doligé et Marc Massion, auteurs cet automne d'un rapport budgétaire sur l'outre-mer. Si l'on retire, comme le fait leur collègue député PS Jérôme Cahuzac, le coût des missions régaliennes de l'État et une partie de la « continuité territoriale », l'effort spécifique atteint tout de même 12,6 milliards par an. À cela, il convient d'ajouter 3,3 milliards d'euros que l'Union européenne va allouer au titre du développement des territoires et de son fonds social pour la période 2007-2013.l'État a joué des exonérations de chargesAu fur et à mesure des années, gouvernements de droite comme de gauche ont empilé les dispositifs dérogatoires censés apporter à chaque fois une bouffée d'oxygène aux économies et aux populations locales. Réduction de 30 % de l'impôt sur le revenu, taux de TVA minoré, abattement d'IS, défiscalisation des investissements (voir ci-dessous) : la vingtaine de dispositifs fiscaux coûte chaque année environ 3 milliards au budget de l'État (3,3 milliards en 2009). Pour un résultat plus qu'incertain. Un rapport non publié de l'inspection générale des finances de juillet 2006, que « La Tribune » a pu consulter, conclut? qu'il est impossible de conclure à l'efficience du dispositif de défiscalisation au plan socio-économique.À côté de l'arme fiscale, l'État a joué des exonérations de charges sociales pour tenter de créer des emplois dans des départements où le taux de chômage dépasse 20 %. Le budget 2009 prévoit 1 milliard d'euros pour la compensation de ces exonérations.Comme l'État ne peut pas obliger les entreprises locales à embaucher, il donne de sa personne en payant un nombre élevé de fonctionnaires. La part des emplois publics est de 38,7 % de la population active en Guadeloupe et de 45,5 % à la Réunion, quand elle n'est que de 23 % en métropole ! Plus de 1,5 milliard d'euros de primes et avantages divers est destiné aux fonctionnaires affectés outre-mer. Jusqu'à ce que le Parlement décide, en fin d'année, de réduire progressivement cet avantage, les fonctionnaires prenant leur retraite dans un DOM bénéficiaient également d'une « surpension ».Cette manne publique a sans doute permis de conforter la croissance outre-mer, qui depuis quinze ans tourne autour de 3,5 % par an. Mais visiblement, elle est n'est pas efficace pour réduire les inégalités, le chômage, la formation insuffisante, les structures archaïques de la possession du capital. P. C.
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