L'année de la guerre des étoiles

Des prévisions pour 2009?? Le consensus des économistes se trompe avec une constance que rien ne désarme, FMI et OCDE détenant la palme de la prévision à contretemps. Il faut donc rester humble et se borner à dégager quelques idées simples. Tout au long de 2009, de puissants mouvements antagonistes vont se combattre?: les « forces du mal », celles du désendettement, de la récession, voire d'une déflation localisée, et les « forces du bien », les considérables plans de relance engagés à la fin 2008. Comme le film est américain, le « happy ending » est vraisemblable ? il devrait y avoir une reprise à la fin 2009, aux États-Unis au moins. À condition que l'aléa principal, le déclenchement d'une crise financière en Chine, ne se produise pas d'ici là. L'année 2009 se jouera sur l'océan Pacifique, dans les relations économiques étroites qu'entretiennent les États-Unis et la Chine. Une victoire de Dark Vador? Il n'y a guère d'incertitudes sur le premier semestre. Tous les indicateurs d'activité pointent vers le bas, et cela dans tous les pays. C'est la première fois depuis 1974-1975, lors du choc pétrolier, qu'on observe une telle synchronie dans la déprime. La chute des secteurs industriels historiques, comme l'automobile, est particulièrement marquée. Les immatriculations de véhicules neufs plongent de 15 % (en France) à 30 % sur un an (en Espagne).Le secteur de la construction est, lui aussi, particulièrement éprouvé, et cela dans le monde entier. C'est un cycle mondial de l'immobilier qui se retourne, et avec lui le nombre d'emplois dans un secteur qui avait été fortement contributif depuis plusieurs années. Partout dans le monde, le prix des logements chute, plus ou moins fortement selon la position dans ce cycle de baisse inauguré en 2006 aux États-Unis. Moins d'emplois, moins de revenus, un patrimoine boursier et immobilier dont la valeur chute, il n'en faut pas davantage pour déprimer la demande finale, celle du consommateur. D'autant qu'il est endetté comme jamais?: 133 % du revenu annuel aux États-Unis, et bien davantage au Royaume-Uni et en Espagne. En Europe continentale, la dette privée est plus faible, mais elle est aussi à son plus-haut historique.Toutes ces tendances convergent pour produire une forte récession début 2009, de plusieurs points de PIB en rythme annuel. Aux États-Unis, mais aussi en Europe, au moins pour les pays de l'arc Atlantique, Espagne, Royaume-Uni, Irlande, qui seront plus touchés que l'Amérique. L'Europe continentale, la France particulièrement, devrait être moins exposée. ?avant le retour du Jedi D'ici à la mi-2009, ces tendances dépressionnaires seront en partie contrées par les gigantesques plans publics de soutien à la demande. Le futur président américain, Obama, qui prendra ses fonctions le 20 janvier prochain, devrait engager quelque 700 milliards de dollars d'ici à 2010, soit 2 à 3 points de PIB par an, en travaux, baisses d'impôts et autres commandes publiques. Les gouvernements européens font de même, en moins important et en moins rapide. Dans le même temps, la baisse des taux va elle aussi contribuer à restaurer, non pas la demande de crédit, mais les marges des banques. Elles achètent en effet moins cher leur « matière première », l'argent des banques centrales. Or des banques plus prospères sont plus enclines à prendre des risques, c'est-à-dire à prêter. C'est favorable à l'activité, qui devrait sortir du rouge à la fin 2009, aux États-Unis au moins.Cette avalanche mondiale de dollars va se traduire par une envolée des déficits budgétaires et la détérioration des bilans des banques centrales ? la Federal Reserve, institut d'émission américain, devrait bientôt émettre elle-même des obligations pour soutenir plus efficacement le système financier. Il y a bien un risque de krach obligataire, à terme, lorsque les investisseurs se rendront compte de l'énormité des emprunts publics. Mais, en bonne logique, il ne se produirait que lorsque les marchés retrouveront de l'appétit pour d'autres produits. Ce qui signerait un certain retour à la normale. ?mais l'empire (du Milieu) peut contre-attaquer À moins que l'on ne replonge dans la crise financière, avec un « troisième tour », le premier ayant été déclenché par la faillite de la banque d'investissement Bear Stearns, en mars 2008, le deuxième par celle de Lehman Brothers, le 15 septembre dernier. Cette hypothèse ne peut être écartée. C'est la situation de la Chine qui inquiète aujourd'hui. Elle est frappée à son tour par la crise. Or son système bancaire est très vulnérable à un ralentissement de la croissance et au retournement du marché immobilier. Un effondrement bancaire en Chine aurait des répercussions indirectes considérables aux États-Unis. Car Pékin mobiliserait ses réserves ? près de 2.000 milliards de dollars ? pour secourir ses banques et son économie, et elle aurait pour cela besoin de vendre ses actifs libellés en dollars? Le monde se rapprocherait de nouveau alors de la crise systémique qu'il a frôlée à l'automne.Nul doute que la crise ne frappe en Chine, de façon plus violente qu'on ne le pense aujourd'hui. Mais la question centrale est celle du calendrier. Si la crise se déclenche alors que les États-Unis sont déjà sortis d'affaire, le pire sera évité. Sinon, l'« alignement » sino-américain nous replongera dans de graves troubles économiques et financiers. 
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