L'infernale machine à faire des bulles

C'est l'enquête dont tout le monde parle. Publiée dans la dernière livraison de « Rolling Stone », elle détaille l'incroyable histoire de la banque d'investissement la plus puissante du monde, Goldman Sachs. Selon l'auteur, Matt Taibbi, cette « pieuvre vampire » a joué un rôle prépondérant dans toutes crises financières du siècle en en tirant d'énormes profits, grâce au réseau des alumni, les ex-Goldman disséminés dans les sphères du pouvoir américain. Dès les années 1920, la firme alimente la spéculation boursière déchaînée qui sera ponctuée d'un krach retentissant, en octobre 1929. L'économiste Galbraith écrira, à propos des techniques financières alors inventées par la banque : « Il est difficile de ne pas s'émerveiller devant la créativité de cette folie gargantuesque. »Soixante ans plus tard, c'est Goldman Sachs qui contribue à démanteler patiemment toute la régulation financière issue de la grande dépression, grâce à Bob Rubin, secrétaire d'État au Trésor de l'administration Clinton, lui-même ancien patron de la firme de Wall Street. L'entreprise en profite de façon insolente, au moment de la bulle Internet. Elle introduit Yahoo sur le marché boursier en 1996, et de nombreuses autres start-up impécunieuses suivront. Elle manipule les cours et associe ses amis aux gains faramineux, sur le dos du petit porteur, qui subira tout seul l'effondrement du Nasdaq.titrisation des prêtsL'appât du gain développe alors un vrai savoir-faire dans l'ingénierie de bulles financières. Après Internet, les hommes de Goldman Sachs jettent leur dévolu sur l'immobilier et la titrisation des prêts, où ils excellent. Matt Taibbi a ainsi retrouvé un lot de prêts titrisés où l'apport moyen des acquéreurs n'était que de 0,71 %? Le lot sera vendu à des investisseurs : risque zéro et commissions substantielles. La bulle explose en 2007, ce n'est pas très grave pour Goldman, qui s'était assurée auprès d'AIG. AIG fait faillite en 2008, mais ce n'est pas non plus très grave : le contribuable américain, appelé à la rescousse, paiera 13 milliards de dollars à Goldman, grâce au plan de sauvetage imaginé par Henry Paulson, patron du Trésor et ancien dirigeant de Goldman. En 2008, année de la plus grave crise financière depuis 1930, la Pieuvre verse 10 milliards de salaires et acquitte un impôt sur les bénéfices de? 14 millions, grâce à l'« optimisation fiscale ».2008 est aussi l'année d'une nouvelle bulle soufflée par les hommes de Wall Street, sur les matières premières et le pétrole. L'or noir atteindra 147 dollars le baril durant l'été, bien que la demande mondiale baisse. Nouvelle culbute, aux dépens de l'économie réelle. Et la machine continue. Selon Taibbi, Goldman travaille désormais sur la prochaine spéculation : le réchauffement climatique et le futur marché des crédits carbone, les permis d'émission qui seront achetés par les industries. Une belle idée du président Obama, dont la campagne a été largement financée par? Devinez qui. François Lenglet
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