Percée des OGM en Afrique de l'Ouest

Large boubou bleu à rayures blanches, un calot assorti sur la tête, le menton grignoté par une légère barbe blanche, François Traoré a été retenu par l'hebdomadaire « Jeune Afrique » comme l'une des cent personnalités africaines de l'année. Le président de l'Association des producteurs de coton africain (Aproca), qui réunit les organisations cotonnières de 13 pays d'Afrique de l'Ouest, fait figure d'anti-Bové de l'agriculture africaine. Il dénonce inlassablement les subventions américaines et européennes, mais croit fermement au coton OGM.« Voilà quatre ans que nous avons commencé à produire du coton OGM à titre expérimental », explique François Traoré en marge de l'université du coton qui s'est tenue la semaine dernière à Ségou, au Mali. Quelque 8.000 hectares de coton ont été plantés l'an dernier au Burkina Faso, premier pays d'Afrique de l'Ouest à avoir autorisé la commercialisation de coton transgénique. « Les résultats sont concluants, explique François Traoré. Les rendements sont supérieurs de 30 % par rapport aux variétés traditionnelles et le coton ? commercialisé par Monsanto ? n'exige que deux vaporisations de pesticides contre six normalement, une bonne chose lorsqu'on connaît la toxicité des pesticides. »C'est un vrai succès. « Tous les producteurs veulent désormais du coton OGM. On ne sait pas si l'on pourra répondre à la demande de semences », commente le cotonculteur. Selon Pierre Tixier, spécialiste du coton africain au ministère français de l'Agriculture, le Burkina Faso pourrait planter jusqu'à 200.000 hectares de coton OGM cette année, soit près du tiers des surfaces réservées à la fibre blanche. « Longtemps réticente aux OGM, l'Afrique de l'Ouest est en train de basculer », estime-t-il.Pourtant, le continent africain ne découvre pas totalement les OGM. « La plupart des pays importent ou ont importé des OGM pour la consommation humaine ou animale en dehors de tout cadre réglementaire », explique Christophe Noisette, rédacteur en chef d'« Inf'ogm », une revue spécialisée. L'Afrique du Sud produit également depuis plusieurs années du maïs, du soja et du coton transgéniques. Les surfaces cultivées y atteignent déjà 1,8 million d'hectares. L'Égypte a également adopté en 2008 une loi autorisant la commercialisation des semences transgéniques.Pression des semenciersMais l'Afrique de l'Ouest était jusqu'ici restée relativement à l'écart. Le Mali, qui a produit jusqu'à 600.000 tonnes de coton, vient d'adopter une loi sur les biotechnologies permettant d'encadrer la commercialisation d'OGM. « Monsanto et Syngenta, les deux principaux producteurs de semences OGM, incitent depuis plusieurs années les gouvernements africains à se doter d'une législation sur le sujet afin de pouvoir déposer des dossiers de commercialisation », explique Christophe Noisette. Le président du Sénégal, Abdoulaye Wade, défend par exemple avec ferveur les OGM. « Les États-Unis en mangent depuis longtemps, or le Sénégal n'est pas gardien de la santé du monde », lançait-il l'an dernier. Mais à Dakar, le Parlement n'a pas un avis aussi tranché et un projet de loi est toujours en discussion. La Gambie et le Ghana y sont également favorables. Le Bénin en revanche a adopté en 2007 un nouveau moratoire jusqu'en 2012. n
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