Le budget de la défense britannique menacé

Et si la Grande-Bretagne renonçait à la dissuasion nucléaire ? Encore impensable il y a six mois, l'idée commence à être sérieusement examinée. Coincé par un déficit budgétaire abyssal, et une armée malmenée en Afghanistan, Downing Street va être forcé de prendre des décisions radicales sur le budget de la défense.Officiellement, Gordon Brown poursuit la politique de renouvellement de l'arsenal nucléaire, décidée par Tony Blair un mois avant de quitter ses fonctions. Mais, discrètement, il a choisi la semaine dernière de reporter les premières dépenses sur le sujet jusqu'au sommet sur la non-prolifération nucléaire au printemps 2010? soit après les élections générales. Une façon de garder toutes les possibilités ouvertes.Si la dissuasion nucléaire est actuellement en jeu en Grande-Bretagne, c'est parce que les sous-marins qui transportent les ogives sont vieillissants. Ils doivent être remplacés d'ici à 2024 et la conception et la construction de leur remplacement requièrent une quinzaine d'années. Mais surtout, le programme risque de coûter plus de 20 milliards de livres (23 milliards d'euros), une somme considérable alors que la dette budgétaire britannique doit doubler d'ici cinq ans.Politiquement, le vent est aussi en train de tourner : le récent accord entre les États-Unis et la Russie de réduire leur nombre de têtes nucléaires d'un quart modifie la donne internationale. Gordon Brown s'est donc engagé publiquement pour la fin du nucléaire militaire dans son pays? même s'il n'en est pas question à court terme et de façon unilatérale. « Mais c'est vrai que la Grande-Bretagne va plus loin que nous sur le principe », reconnaît une source française.Au-delà du nucléaire, d'autres grands programmes militaires sont aussi sur la sellette. Alors que les troupes britanniques combattent essentiellement dans des conflits « asymétriques » (Irak, Afghanistan?), se pose la question de l'utilité de deux nouveaux porte-avions, objets d'une commande passée l'an dernier. Dans un récent rapport, l'Institute for Public Policy Research identifie quatre programmes, estimés à près de 28 milliards d'euros, qui pourraient passer à la moulinette budgétaire. Le rapport insiste en particulier sur la nécessité de ne pas « dupliquer les capacités américaines à plus petite échelle », mais de faire des choix stratégiques : « Il est clair qu'il y a un trou noir dans le budget de la défense si le Royaume-Uni persiste avec ses plans actuels. »Les hauts gradés britanniques répliquent que le budget de la défense n'atteint que 38 milliards de livres (44 milliards d'euros), soit 5,7 % du budget national. Mais, depuis une décennie, sa hausse est constante : en moyenne 2,1 % par an en termes réels. Cette progression s'explique en partie par les coûteuses opérations terrestres en Irak et en Afghanistan, mais aussi parce que l'armement moderne coûte de plus en plus cher. La crise du budget de la défense était donc attendue, avant même la récession économique. Cette dernière rend désormais les coupes inévitables. Reste à dresser la liste des sacrifices.
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