Le franc suisse ne fait plus recette

Jadis monnaie refuge en temps de crise, le franc suisse est aujourd'hui en situation critique. Depuis la nouvelle baisse des taux helvétiques, réduits de 100 points de base, à 1 %, le 20 novembre, le franc s'est affaissé, effaçant sa reprise de l'été. Après avoir chuté à un plancher historique face à l'euro en octobre 2007, en pleine vogue du « carry trade » (les stratégies de portage consistant à jouer sur les écarts de rendements), pour tomber jusqu'à 1,68, il avait rebondi dès le début de leur débouclage jusqu'à 1,44 pour 1 euro le mois dernier. À la veille du week-end, le « swissie », son surnom anglo-saxon, ne valait plus que 1,55. Face au dollar, la glissade du franc est encore plus prononcée. Il a cédé 18 % de sa valeur depuis la mi-juillet, au moment ou le billet vert a interrompu six ans de dérive quasi ininterrompue.Pendant ce temps, le yen, avec qui il partageait le rôle de victime des stratégies à effet de levier, caracole au grand dam des autorités nipponnes, alors même que leurs homologues helvètes commencent à se soucier de la dérive de leur franc. Ce qui se traduit par un recul du franc suisse par rapport au yen de plus de 15 %.Comment expliquer le divorce entre ce couple de monnaies qui évoluaient de concert?? D'abord, parce que le swissie a été un vecteur du « carry trade » nettement moins important que le yen, monnaie de la deuxième puissance économique mondiale, qui est aussi le plus gros exportateur de capitaux de la planète. Ensuite parce que la Confédération a administré une thérapie de choc sur ses taux, qui n'est sans doute pas arrivée à son terme, en les réduisant de 2 % en deux mois, alors que la marge de man?uvre de la Banque du Japon est extrêmement limitée. Tout au plus a-t-elle concédé une détente de son taux directeur de 20 points de base, en le ramenant de 0,5 % à 0,3 % le 21 octobre. Enfin, parce que le système bancaire suisse, éminemment important rapporté au PIB, apparaît beaucoup plus fragile que celui du Japon. Deux des fleurons de la finance helvétique suscitent des inquiétudes, à commencer par UBS, qui a déjà bénéficié de l'injection de fonds publics et dans une moindre mesure le Crédit Suisse.C'est ce triptyque qui sous-tend la faiblesse du franc suisse et qui lui a fait perdre le statut de valeur refuge dont il avait bénéficié pratiquement tout au long du cycle monétaire qui a suivi l'abandon du système de changes fixes en 1971 et l'entrée dans l'ère des changes flottants. Et aujourd'hui, c'est le dollar, lui-même devenu une monnaie à faibles rendements mais plus liquide, qui lui fait de l'ombre. Isabelle Croizard
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