Quand les Verts font bon ménage avec la CDU

L'hôtel de ville de Francfort fut pendant cinq siècles le lieu d'élections des empereurs germaniques. C'est dire si le bâtiment est habitué aux combinaisons politiques sous haute tension. Depuis trois ans, cependant, l'harmonie règne dans ses vénérables bureaux. Étonnant quand on sait que la ville est dirigée par une coalition a priori assez explosive entre les Verts, héritiers du mouvement contestataire des années 1970, et le Parti démocrate chrétien CDU, plutôt réputé conservateur. Et pourtant? « Le fonctionnement de la coalition est exemplaire, il n'y a pas de frictions et les discussions sont orientées vers la réalité des dossiers », se réjouit Olaf Cunitz, président du groupe Verts au conseil municipal. Pas de quoi regretter une alliance avec le SPD. Au point que les écologistes ne se cachent pas de vouloir poursuivre la coalition actuelle après les prochaines élections municipales.Certes, la politique locale en Allemagne est souvent, même dans les grandes villes, assez éloignée des préoccupations nationales, moins idéologique et plus pragmatique. Mais il n'empêche : les programmes des Verts et de la CDU peuvent sembler aux antipodes l'un de l'autre. Les deux formations politiques ont cependant abordé cette collaboration dans un esprit mutuel de compromis. Les Verts ont certes dû avaler quelques couleuvres : voter une réduction de la taxe professionnelle ou la création d'une police municipale de volontaires. Mais, affirme Olaf Cunitz, ils ont aussi su imposer leurs choix : la place des espaces verts a été réévaluée, l'interdiction du centre-ville aux véhicules polluants instaurée, les lignes de trams et de métro développées, même la politique d'aide sociale et de soutien aux sans-papiers a évolué dans le sens prôné par les Verts, malgré les réticences initiales de la CDU.Le principe d'efficacitéÉgrenant ce bilan positif, Olaf Cunitz prône le principe d'efficacité : « Si nous avons la possibilité d'agir pour le développement d'une politique verte, pourquoi s'en priver ? » Il affirme que Francfort mène une politique écologique. « Beaucoup de ceux qui étaient sceptiques au début le reconnaissent aujourd'hui », appuie-t-il. Les derniers scrutins lui donnent raison. Aux élections régionales en janvier, la liste verte a fait jeu égal avec le SPD à Francfort et l'a dépassé de plus de cinq points aux européennes de juin.Forte de ce succès, l'alliance Verte et Noire, qui gouverne également Hambourg et qui, pendant des années, a régi Cologne, a-t-elle alors un avenir au niveau fédéral ? Certains l'évoquent. Mais les conditions sont encore loin d'être remplies. Officiellement, les deux partis rejettent cette possibilité au niveau fédéral. Chez les Verts, le sujet est sensible et la gauche en fait une question de principe. Le Vert Olaf Cunitz rappelle également que « la CDU de Francfort est nettement moins conservatrice que dans d'autres régions du pays, ce qui a permis la coalition avec les Verts ». Mais cette tendance plus centriste de la formation des chrétiens démocrates est justement incarnée par Angela Merkel et le système politique allemand à cinq partis oblige à repenser les alliances traditionnelles. L'occasion fait le larron. À Francfort, l'affaiblissement du SPD a ouvert la voie à la coalition actuelle. « Les Verts ne doivent exclure aucune formule de coalition pour l'avenir », estime Olaf Cunitz. Alors, qui sait?
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