Les méthodes controversées de la chambre d'accusation

La Cour de cassation doit rendre aujourd'hui un arrêt très attendu sur le fonctionnement de la chambre d'accusation, une juridiction très controversée. Le 24 juin dernier, Marc Borten, avocat, s'est rendu à la chambre d'accusation pour examiner les pièces du dossier de l'un de ses clients, afin de préparer son mémoire pour l'audience qui devait se tenir le 26 juin. La chambre devait se prononcer sur la comparution du prévenu à la cour assises. Pour sa part, l'avocat avait l'intention de demander un non-lieu. Quelle ne fut pas la surprise de Marc Borten quand il a découvert que la chambre d'accusation avait déjà pris sa décision, deux jours avant la date prévue. Un extrait de l'arrêt précisant que son client était envoyé aux assises, signé du greffier et post-daté au 1er juillet figurait dans le dossier ! La chambre avait statué sans que l'avocat ait pu défendre son client. Une péripétie qui laisse rêveur sur la façon dont la chambre conçoit son rôle. Pour Marc Borten, avocat, qui a saisi la Haute Cour jeudi dernier, « il existe des éléments objectifs de nature à penser que cette juridiction n'est pas impartiale ». Les droits de la défense. La chambre d'accusation, qui contrôle la mission des juges d'instruction, se trouve une fois de plus mise en défaut pour violation des droits de la défense. Marc Borten a déposé une requête auprès de la Cour de cassation, suspendant la procédure jusqu'à ce jour. Si la Cour rejette la requête de l'avocat, la prochaine audience de la chambre d'accusation est fixée au 16 juillet. Marc Borten a également porté plainte lundi dernier auprès du procureur de la République pour faux en écriture publique (qualifié de crime en droit français) et prise de mesure par un dépositaire de l'autorité publique destinée à faire échec à l'exécution de la loi. Dysfonctionnements. Dans le monde juridique on reproche souvent à la Chambre d'accusation, qui statue sur toutes les affaires criminelles et en appel sur les mises en liberté, les nullités et les non-lieux, d'être une « chambre d'enregistrement », confirmant en fait les ordonnances du juge d'instruction au lieu de les contrôler. « Un avocat n'obtient quasiment jamais de mise en liberté devant la chambre d'accusation », constate Laurence Bedossa, avocate. Certains représentants de la défense n'hésitent pas à parler d'un « alibi de justice », la chambre étant considérée comme « éminemment répressive ». Il y a pourtant des cas où elle ne l'est pas et où elle infirme la décision du juge, ironisent certains, citant volontiers le dossier Tibéri, classé pour nullité la semaine dernière. Comment expliquer ces dysfonctionnements ? « L'évolution dans la hiérarchie fait que les juges d'instruction passent fréquemment à la chambre d'accusation. A Paris, les magistrats de la chambre sont presque exclusivement d'anciens juges d'instruction », explique Laurence Bedossa, qui précise : « Il existe un véritable esprit de corps, une solidarité entre ces magistrats. » Certaines voix, dont celle du bâtonnier de Paris, assurent que le Premier président de la Cour d'appel, Guy Canivet, a essayé d'améliorer les choses. Mais les insatisfactions du côté de la défense sont encore immenses. Guénaëlle Le Solleu
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