Les entreprises plus sûres que les États  ?

Cette crise n'en finit pas de nous étonner. Elle apporte chaque jour son lot de surprises, d'incohérences ou d'aberrations. Depuis quelques jours, nous avons franchi une nouvelle étape, passée relativement inaperçue, mais qui pourtant bouleverse les fondamentaux de l'économie mondiale. Et son fondement même : la confiance dans les États. Rassurez-vous. Je ne vais pas reprendre la litanie habituelle sur la Grèce ou sur l'Islande, ou mon obsession : le Chapter 11, à venir des États-Unis... À la suite d'une enquête publiée par le « Wall Street Journal », j'ai étudié l'évolution récente du marché des CDS, les Credit Default Swaps, ces assurances contre la faillite d'une entreprise ou d'un État. En comparant les CDS des entreprises et ceux des États, je suis d'abord tombé sur des évidences : le CDS sur une entreprise saine, dans un pays stable, est moins élevé que le CDS sur un pays « risqu頻. Logique. Il est évidemment plus cher de se garantir contre la faillite de la Grèce ou de l'Islande que contre celle de Walmart. Mais ce qui est plus choquant, c'est que le risque de certains pays est devenu plus élevé que celui de certaines entreprises du même pays ! Je m'explique. Aujourd'hui, il coûte plus cher de s'assurer contre la faillite de l'Espagne que contre celle de la banque Santander ou de BBVA ; idem en Italie, où la signature de l'État vaut moins que celle d'Enel ou de Sanpaolo, ou en Angleterre, où le distributeur Tesco est plus sûr que l'État de Sa Majesté. Même aux États-Unis, les faillites du laboratoire pharmaceutique Merck ou de Coca-Cola sont moins probables que celles du Trésor.Et en France ? Là encore, la surprise est de taille. Les CDS sur Air Liquide ou sur France Télécome;lécom (certes détenus à 27 % par l'État) sont inférieurs à ceux de l'État français ! Cela fait tout de même une drôle d'impression, non ? Et c'est un véritable signal d'alarme.Parmi les nombreux facteurs d'explication, une raison s'impose : la différence de la réaction d'une entreprise et d'un État face une crise. Les entreprises en crise réduisent leurs dépenses, se concentrent sur la hausse de leurs revenus et cherchent à réduire leurs dettes pour assainir leur bilan. Les États en crise promettent de faire la même chose mais ne le font pas. À part l'Allemagne, qui, aujourd'hui en Europe, cherche réellement à agir ? Je ne parle pas de l'agitation anxiogène et inefficace de notre président et de sa conférence sur le déficit, je parle d'une véritable action. Les investisseurs sanctionnent ce manque de courage, une gestion populiste du déficit et de la dette, qui ne peut qu'empirer avec le vieillissement de la population et l'explosion des retraites et des régimes sociaux.Un État n'est certes pas une entreprise. Mais un État en difficulté financière, sans aller même jusqu'à la faillite, ne peut plus assumer ses obligations ni remplir ses devoirs. Il doit donc être, partiellement, géré comme une entreprise. Et un patron spécialiste des « redressements » qui aurait à gérer la France, l'Italie, l'Espagne, l'Angleterre ou les États-Unis appliquerait les seules recettes possibles : une hausse des revenus, les impôts, une baisse des dépenses : services publics, retraites, remboursements médicaux, coupes claires dans les « frais de siège » (assez de sommets aussi inutiles que coûteux...). Mais les finances des États sont malheureusement gérées par des politiques et pas par des entrepreneurs, des politiques qui sont toujours entre deux élections et qui s'appuient souvent sur des oligarchies incompétentes. Tant que cela durera, il y aura de plus en plus d'entreprises qui seront plus sûres que leurs États... à contre-courant Marc Fiorentino Stratège d'Allofinance.com
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