L'assurance vie n'est plus le placement préféré des Français...ni des assureurs

Rien en sera plus jamais comme avant pour l\'assurance vie. Il y a encore deux ans, elle attirait les trois-quarts de l\'épargne financière des ménages français...alors que l\'an dernier elle n\'en draînait plus qu\'un quart. Et \"cette tendance se poursuit en 2012\", a reconnu Jean-François Lequoy, délégué général de la Fédération française des sociétés d\'assurance (FFSA),  lors de la présentation des chiffres du secteur fin juin.Un désamour qui profite au Livret A et au Livret de développement durable (LDD),  sans risque, sans taxe et finalement assez rentables dans le contexte actuel avec un taux de 2,25% par an. Un désamour qui peut aussi s\'expliquer par la volonté des banques - qui distribuent historiquement plus de 60% de l\'assurance vie- d\'orienter une plus grande partie des flux financiers de leurs clients vers des produits qui apportent plus de liquidités aux établissements, c\'est-à-dire vers des produits d\'épargne purement bancaire.Le Livret A a le vent en poupeSi le Livret A s\'achemine vers un record de collecte, à l\'inverse, les retraits sur les contrats d\'assurance vie continuent de dépasser le montant des versements. Résultat : 4,7 milliards de collecte nette négative au premier semestre qui fait suite à une collecte négative pendant cinq mois consécutifs d\'août à décembre en 2011. Et cette tendance pourrait bien être durable car les taux de rendements sur les fonds en euros de l\'assurance vie (la partie sans risque avec capital garanti) vont continuer de baisser.Des performances faibles en prévision pour l\'assurance vieDe 4,1% en 2007, la performance moyenne des fonds en euros est passée à 4% en 2008 puis 3,7% en 2009, 3,4% en 2010 et 3% en 2011. Compte tenu de la volatilité des marchés, peu de sociétés se risquent aujourd\'hui à des prévisions pour la fin de l\'année. A une exception notable : le  premier assureur vie français, CNP Assurances, a annoncé qu\'il prévoyait 2,7% comme rémunération des fonds en euros de ses contrats au titre de l\'année 2012, ce qui donne une indication précieuse.Avec la faiblesse des taux de rendement des obligations souveraines françaises ou allemandes vers lesquelles se sont souvent repliés les assureurs car elles sont jugées moins risquées, il est de toute façon très peu probable que le taux remontent ou même se stabilisent. Et pour les compagnies et leurs sociétés de gestion, pas question de jouer avec le feu. \"Pour éviter de subir une trop grande volatilité, nous ne revenons pas sur les \"PIIGS\" (Portugal, Italie, Irlande, Grèce et Espagne). Sur l\'Espagne, où les obligations d\'Etats sont très volatiles, nous préférons nous priver de rendement élevés, plutôt que de prendre le risque d\'une décote de 30%.\", explique à La Tribune Pascal Heurtault, responsable des investissements d\'Aviva Investors, qui pilote le fonds général des contrats d\'Aviva Vie et celui de l\'AFER. La prévoyance beaucoup plus rentable  pour les assureurs Même s\'ils cherchent à diversifier leurs investissements (notamment vers les obligations d\'entreprises, l\'immobilier ou les infrastructures) pour améliorer les performances de leurs portefeuilles, les assureurs avouent sans fard que leur priorité n\'est plus de collecter de l\'assurance vie-épargne. Et pour cause : elle ne rapporte plus suffisamment. Les marges bénéficiaires sont bien plus élevées sur les produits de prévoyance qui couvrent un risque comme le décès, l\'invalidité ou encore la dépendance.CNP Assurances indiquait ainsi, lors de la présentation de ses résultats semestriels vendredi 27 juillet, que la marge sur les produits dits \" de risque\" progressait de 2 points en un an soit de 12,6% à 14,6% pour le ratio résultat brut d\'exploitation sur chiffre d\'affaires. Dans le même temps (voir graphique 1 ci-dessous), la marge baissait légèrement pour les produits d\'assurance vie épargne de 0,26% à 0,24% pour le ratio résultat brut d\'exploitation sur encours moyens. La marge recule également pour les produits d\'assurance retraite de 0,34% fin juin 2011 à 0,20% fin juin 2012.Il apparaît aussi clairement que CNP voit son résultat d\'exploitation fortement progresser (+32,6%) sur les produits dits \"de risque\" comme l\'assurance décès, l\'assurance emprunteur, l\'assurance contre l\'invalidité ou la dépendance plutôt que sur les produits d\'épargne (-24,6%) ou sur les produits de retraite (-55,3%) comme le montre le graphique n°2 ci-dessous.CNP n\'est d\'ailleurs pas un cas isolé. Le groupe Axa a lui aussi décidé de réorienter son activité d\'assurance vie davantage vers la prévoyance plutôt que vers l\'épargne.  Avec 45% de marge sur les affaires nouvelles au premier trimestre 2012 ( et même 47% pour l\'ensemble de 2011) la prévoyance et la santé dépassent de loin l\'assurance vie en euros dont la marge s\'est établi à -6% fin mars (-4% fin 2011).Un encours considérable de 1370 milliards d\'eurosL\'âge d\'or de l\'assurance vie \"classique\" est donc certainement terminé. Ce placement \"à tout faire\" va devoir évoluer vers de nouvelles formules pour tenir compte des contraintes de performances, des nouvelles attentes des clients et de la concurrence. Pour autant, ce changement ne se fera que très progressivement car les 1370 milliards d\'euros actuellement placés en assurance vie vont en grande majorité rester sur leurs contrats d\'origine.La question du réemploi par les épargnants de l\'argent retiré de leurs contrats d\'assurance vie (63,2 milliards sur les six premiers mois de 2012) et de la destination des nouveaux versements, se pose néanmoins. Les assureurs doivent donc trouver des solutions attractives et rentables pour tous (pour les assurés comme pour les compagnies) afin de capter cette épargne. Trois scénarios s\'offrent à eux : proposer  des produits mixtes qui combinent épargne et prévoyance ; proposer des produits plus financiers avec des perspectives de gains plus élevées mais une garantie sur le capital différée dans le temps jusqu\'au terme du placement ; et enfin, proposer des produits d\'assurance vie \"packagés\" par type d\'usage, par exemple pour avoir un revenu complémentaire à la retraite, pour transmettre son patrimoine, pour un projet (achat immobilier ou études des enfants notamment), etc. Graphique 1 : La prévoyance dégage plus de marge que l\'épargne chez CNP AssurancesSource : CNP Assurances.RBE: résultat brut d\'exploitationCA : chiffre d\'affairespts : points  Graphique 2 : Le résultat d\'exploitation de CNP progresse rapidement sur les produits de risqueSource : CNP Assurances.
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