L'énigme des rendements à long terme

tauxL'énigme des rendements obligataires ? le conundrum évoqué par Alan Greenspan à la fin de son long mandat à la tête de la Réserve fédérale ? est à nouveau d'actualité. Ils font en effet l'objet d'une double anomalie. D'abord l'appétit retrouvé pour le risque des investisseurs a entraîné durant l'été un mouvement concomitant de hausse des indices boursiers et de rally des emprunts d'État dont les taux, qui évoluent à l'inverse des prix, ont recommencé à se détendre après ce qui s'était apparenté à un krach au premier semestre de 2009. chercher l'erreurAinsi, après avoir quasiment doublé pour passer de 2 % à 4 %, le rendement des obligations américaines à dix ans a, depuis, cédé plus de 60 points de base, refluant hier jusqu'à 3,37 %. Le mouvement a été analogue de ce côté-ci de l'Atlantique, bien que d'ampleur plus modeste, le taux des bunds à dix ans, référence de la zone euro, revenant d'un pic de plus de 3,70 % à 3,23 % au plus bas mardi. Or, traditionnellement les valeurs refuges que sont les emprunts d'État en période d'incertitudes exacerbées ont tendance à se dégrader dès lors que revient le goût du risque qui favorise les actifs boursiers. Deuxième bizarrerie : la reprise économique annoncée, grâce aux opérations coup-de-poing des États et des banques centrales, et les craintes inflationnistes qu'elle génère, ne sont pas compatibles avec le mode détente dans lequel s'inscrit le marché obligataire. D'autant qu'il croule sous une avalanche d'émissions de titres de la dette publique qui devrait susciter une exigence de prime de risque de la part des investisseurs. Il faut donc chercher l'erreur. Le maintien des rendements à long terme à un niveau relativement bas s'expliquerait par l'aspect atypique de la reprise en cours et les doutes récurrents sur sa pérennité. D'aucuns estiment qu'elle fera « pschitt » dès que les remèdes de cheval, monétaires et budgétaires, qui ont été appliqués aux économies en crise, seront consommés. Et tous les observateurs savent pertinemment que, si reprise durable il y a, elle ne ressemblera en rien à ce qu'a connu le monde industrialisé, car elle sera d'une extrême atonie. La remontée des indices des directeurs d'achats du secteur manufacturier, à 48,2 dans la zone euro et au-dessus de la ligne de démarcation entre contraction et progression de l'activité située à 50 aux États-Unis, n'y change rien. La plupart des stratèges taux ont radicalement révisé leurs scénarios concernant l'évolution du loyer de l'argent, repoussant les dates auxquelles les grandes banques centrales devraient se résoudre à durcir les conditions de crédit qui n'ont jamais, dans l'histoire, été aussi proches de zéro. La détente des rendements longs pourrait donc s'amplifier à l'automne. Isabelle Croizard
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