Des leçons monétaires suisses à tirer au Japon

Tout schuss, le franc suisse explose les compteurs sous l'oeil impuissant des gnomes de Zurich. La monnaie helvétique a pulvérisé dans la nuit de mardi à mercredi un nouveau record historique face à l'euro. Il s'est propulsé jusqu'à 1,2850, avant de faire l'objet de prises de bénéfice, à la faveur de la reprise de l'euro face au dollar momentanément remonté au-dessus de 1,28. Cela porte néanmoins à 15 % son appréciation face à la monnaie unique depuis le début de l'année, encouragée par l'aversion au risque, qui a redonné au franc son statut de valeur refuge. Même si la Banque nationale suisse (BNS) prétend « surveiller très étroitement » l'évolution de sa monnaie, les acteurs du marché des changes savent que le président Philipp Hildebrand et ses pairs ont baissé les bras depuis le début de l'été, après avoir pratiqué une politique de change extrêmement interventionniste. Une agressivité qui avait conduit à un quasi-doublement de ses réserves de change au cours du seul mois de mai. Trésor de guerreEn raison de ses achats massifs d'euros contre francs suisses, le trésor de guerre de la banque centrale atteint 262 milliards de dollars. Le lutte inégale entre la BNS et le marché des changes devenait d'autant moins efficace que la Suisse a retrouvé des niveaux de croissance suffisants pour ne plus redouter que le moteur de cette progression - les exportations - soit grippé par une appréciation de la monnaie helvète.Le Japon, tenté par une politique de change plus interventionniste face à la vigueur de son yen, ferait bien de méditer la leçon que lui donne la Suisse : les interventions isolées, si elles vont contre le vent, ne sont que purs coups d'épée dans l'eau. D'autant que les autres grandes banques centrales n'ont aucunement l'intention de préparer un assaut concerté sur le marché des changes - la dernière opération conjointe remontant à l'an 2.000 pour soutenir l'euro alors en pleine déconfiture - dans un contexte où tous les protagonistes sont tentés par le bénéfice supposé d'une monnaie faible sur leur croissance. Pour la Banque du Japon un retour à la politique d'interventions systématiques - qu'elle a interrompue depuis mars 2004 - serait voué à l'échec. Car même si le yen flirte à nouveau avec son plus haut niveau depuis 1995 face au dollar, atteint le 24 août à 83,60, il n'est pas aussi surévalué qu'il y paraît. C'est la raison pour laquelle le marché des changes n'a tenu aucun compte du nouveau proramme d'injections de liquidités annoncé dans l'urgence lundi par la Banque du Japon. À l'heure actuelle le taux de change effectif réel du yen, corrigé des différentiels d'inflation avec les principaux partenaires commerciaux du Japon (qui vit à l'heure de la déflation depuis près d'une décennie) est inférieur de quelque 6 % à sa moyenne des vingt dernières années. Face au dollar, pour que le record absolu de 1995, de 79,75 yens pour un dollar, soit égalé, il faudrait que la monnaie nipponne monte jusqu'à... 55 selon les calculs de la Deutsche Bank.Les interventions isolées, si elles vont contre le vent, ne sont que purs coups d'épée dans l'eau.
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