4 Le défaut organisé comme arme salvatrice

C'est le tabou absolu. « Voir un État européen faire faillite ou être incapable de rembourser sa dette, c'est un tabou absolu, on ne l'envisage pas », confie un responsable européen. « Mais marteler qu'il n'y a pas de problème de solvabilité n'a jamais permis de restaurer la solvabilité d'un pays », rappelle Éric Chaney, chef économiste d'Axa. L'Argentine en fournit une excellente illustration.La situation de plusieurs pays européens - tout particulièrement la Grèce et le Portugal - présente des similitudes troublantes avec celle de l'Argentine juste avant qu'elle ne fasse défaut le 23 décembre 2001. Pour lutter contre l'hyperinflation, Buenos Aires ancre au début des années 1990 le peso au dollar. C'est un succès. La croissance repart.Mais la compétitivité de l'économie se dégrade fortement à la fin des années 1990 avec la chute des monnaies latino-américaines, notamment le real brésilien, emportées par le tourbillon de la crise asiatique. Les finances publiques se dégradent et les marchés se montrent de plus en plus réticents à prêter à Buenos Aires contraignant le FMI à multiplier les plans de sauvetage.Chaque nouvelle tranche est assortie d'un plan d'austérité supplémentaire qui plombe un peu plus la croissance rendant impossible le retour à l'équilibre des finances. Surtout, les prêts du FMI ne règlent pas les problèmes de compétitivité - liés à la surévaluation du peso - de l'Argentine. Fin 2001, le pays dévalue massivement et fait défaut sur sa dette extérieure libellée en dollars.La situation de la Grèce et du Portugal n'est guère différente. Depuis son entrée dans la zone euro, la dette portugaise n'a cessé de grimper faute de croissance. Elle atteindra 97 % du PIB en 2011, selon la BRI. Même chose en Grèce où elle grimpera même jusqu'à 130 % l'an prochain. Le manque de compétitivité de ces deux économies interdit le retour d'une croissance forte.« Une restructuration de la dette de ces deux pays paraît inévitable », estime Éric Chaney. Le retour de la croissance sur le Vieux Continent ne sera pas suffisant pour permettre à ces deux pays de stabiliser leur endettement. D'autant que leur manque de compétitivité les condamne au mieux à une croissance molle.« Le problème, c'est que les mesures annoncées ce week-end ne permettent pas d'envisager une restructuration ordonnée de la dette de ces pays », estime Jérôme Sgard, chercheur au Ceri. L'introduction de clauses d'action collective (CAC) à partir de 2013 ne résout rien à court terme. Une décennie sera nécessaire pour que l'ensemble des obligations des deux pays soient assorties de ces clauses. Or, la restructuration de la dette de ces deux pays n'attendra pas 2023 ! Xavier Harel
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