Immobilier : la vérité des prix passe par la transparence

Incomplètes, parfois obscures et pas toujours fiables, quand elles ne sont pas simplement destinées à faire la publicité de tel ou tel réseau immobilier : les statistiques sur l'immobilier et le logement en France sont entachées de bien des défauts. « Le marché du logement souffre d'un manque d'information flagrant », martèle François Ortalo-Magné, président du département immobilier à la Wisconsin School of Business. « Aux états-Unis, non seulement les transactions immobilières sont accessibles au public, mais les caractéristiques des biens vendus ou à vendre peuvent être connues dans le détail. Ce qui permet aux particuliers d'avoir une véritable idée de la valeur de leur bien. Ce n'est pas le cas dans l'Hexagone, où on se borne à parler en prix au mètre carré habitable alors que beaucoup d'autres critères influent sur le prix des biens ». Or, l'immobilier et la construction occupent une place centrale dans l'économie : les ménages français consacrent 22,6 % de leur revenu disponible brut aux dépenses en logement et le bâtiment emploie 1,2 million de salariés.Précisément, le Conseil national de l'information statistique (Cnis), auquel le secrétaire d'état au logement Benoist Apparu avait confié en août une mission d'analyse, vient de rendre son rapport. « Ce n'est pas l'absence de données qui saute aux yeux, mais le trop-plein », relève Bernard Vorms, qui a piloté le groupe de travail et dirige l'Agence nationale pour l'information sur le logement (Anil). « Qu'il s'agisse de l'évolution la plus récente des prix ou des loyers, du volume de la construction ou du nombre de mal-logés, il y a profusion de chiffres parfois contradictoires. » Premier problème, l'accès aux statistiques est malaisé, y compris pour les agents de l'état. « Les collectivités locales, qui sont pourtant des acteurs à part entière de la politique du logement, se voient parfois refuser des informations dont dispose l'administration centrale, tandis que certains services de l'état sont eux-mêmes privés de données », note le rapport. Deuxième écueil, il est difficile de faire le tri entre statistiques sérieuses et chiffres fantaisistes, privés comme publics. « L'information méthodologique mise à disposition sur les prix de l'immobilier par les sources d'origine privée ? Fnaim, réseaux de franchise, sites Internet  ?, est d'une qualité très inégale : cela va d'une thèse de doctorat à un simple feuillet A4 », relève le rapport. « Deux instances cofinancées par le ministre du logement et l'Agence nationale de l'habitat offrent des estimations de loyer qui différent de 30 % dans deux villes importantes », ajoute-t-il. Aussi le Cnis préconise-t-il la création d'une instance neutre qui serait chargée d'auditer, à leur demande, la pertinence des différentes sources de données, sans prétendre pour autant leur accorder une certification.données de grande valeurA l'inverse, des données de grande valeur comme celles de la Direction générale des finances publiques qui détient une information exhaustive sur les prix des logements, afin de réaliser les contrôles fiscaux, ne sont pas assez exploitées alors qu'il suffirait de les rendre anonymes pour les publier. « L'opportunité des dispositifs d'aide à l'investissement locatif a fait débat. Or il n'y a aucune information officielle sur le nombre de logements qui ont été construits dans ce cadre », ajoute Bernard Vorms. « La mise à disposition de telles informations permettrait de mieux faire fonctionner le marché, sachant que le coût de production pourrait en être amorti auprès des utilisateurs ». Les données sur les plans de financement des accédants à la propriété sont aussi incomplètes alors qu'un pilotage fin de l'économie du logement requiert une connaissance approfondie des opérations menées par les ménages et des caractéristiques de ces derniers.Mais « l'exigence la plus impérative est de disposer d'indicateurs précoces susceptibles d'éclairer en temps réel les décisions publiques et privées », martèle le rapport. Sur ce point, les choses avancent. Ainsi, les notaires qui n'alimentaient leurs bases de données que sur la base du volontariat, sont disposés à le faire de manière exhaustive. Ils se sont aussi engagés à communiquer avant la fin 2010 sur les promesses de vente, signées trois mois avant les transactions définitives, ce qui permettra de donner plus rapidement la vérité des prix.
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