Le triste bilan d'une économie algérienne sans espoir

L\'Algérie célèbre ce jeudi 5 juillet le cinquantenaire de son indépendance dans l\'inquiétude face à un avenir incertain. La fête est gâchée par l\'annonce, la veille, par le ministre des Finances Karim Djoudi, d\'un éventuel plan de rigueur pour faire face à la baisse du prix du pétrole, dont dépend l\'économie du pays. Le ministre de l\'Énergie Youcef Yousfi a exprimé des inquiétudes et estimé le manque à gagner à 20 milliards de dollars cette année si le pétrole continuait à baisser. Cette agitation s\'explique par la forte dépendance de l\'économie algérienne vis-à-vis des hydrocarbures qui illustre le bilan mitigé des cinquante années d\'indépendance du pays.Echecs de la politique économiqueLe régime en place depuis 1962 n\'a réussi ni à diversifier l\'économie, entièrement dépendante des hydrocarbures, ni à lutter contre la corruption généralisée, ni à stopper l\'avancée de l\'économie informelle (40 % du PIB). L\'ouverture économique a été un échec. Tout comme les privatisations. Pourtant, entre 2001 et 2011, plus de 500 milliards de dollars ont été dépensés pour moderniser les infrastructures de base et améliorer les conditions de vie des Algériens. Pour l\'économiste Abdelmadjid Bouzidi, « le bilan des cinquante ans d\'indépendance n\'est pas bon ». « Le pays se désindustrialise, la dépendance alimentaire augmente, la pauvreté s\'installe dans des pans entiers de la société », regrette M. Bouzidi.Absence de diversificationLes dépenses faramineuses (500 milliards de dollars) effectuées entre 2001 et 2011, grâce à la manne pétrolière, pour moderniser les infrastructures de base et améliorer les conditions de vie des Algériens n\'ont pas permis à l\'économie de se diversifier. L\'Algérie ne produit presque rien et nourrit sa population grâce aux importations. Son industrie agonisante représente moins de 5 % du PIB, en dépit des sommes colossales injectées par l\'État pour relancer les entreprises publiques. Son agriculture, archaïque, n\'arrive pas à satisfaire la demande locale en pommes de terre et en tomates. En 2011, les importations avaient atteint le record de 46 milliards de dollars, dont cinq milliards de dollars de produits alimentaires. « S\'il n\'y avait pas le pétrole, l\'Algérie serait au même niveau de développement que les pays du Sahel », déplore le directeur général d\'un groupe public. « Quand les caisses de l\'État sont pleines, comme c\'est le cas actuellement, le gouvernement bloque les initiatives et veut tout contrôler », ajoute t il.Immobilisme gouvernementalLes chefs d\'entreprises accusent le gouvernement d\'être à l\'origine de l\'immobilisme économique de l\'Algérie. Ils se plaignent du blocage de leurs projets d\'investissements, de régionalisme dans la répartition de ces projets et de favoritisme dans l\'octroi de terrains et de financements aux investisseurs. Ils dénoncent un environnement économique exécrable et un retour au dirigisme des années du socialisme (1962 1988). « On leur dit que le pétrole va s\'épuiser, ils nous répondent que nous avons le solaire », ironise Réda Hamiani, président du Forum des chefs d\'entreprises (FCE) sur l\'absence d\'une vision économique en Algérie. « Le Maroc et la Tunisie ont des stratégies de développement sur 5, 10, 20 ans. Ce n\'est pas le cas de l\'Algérie. On n\'a pas de vision sur ce que sera l\'Algérie de 2025 ou de 2030 », déplore t il.Le pire à venir ?Et si la situation actuelle est mauvaise, le pire est à venir. « À partir de 2020, les recettes pétrolières du pays devraient commencer à diminuer », avertit l\'ancien PDG du groupe pétrolier public Sonatrach, Abdelmadjid Attar, qui plaide en faveur de l\'utilisation de la rentre pétrolière pour assurer la transition énergétique du pays à partir de 2025. L\'Algérie devrait commencer à importer du pétrole à partir de 2020 et ses exportations de gaz devraient diminuer en raison de la hausse de la demande locale et du recul de ses réserves. Sans rente pétrolière, le gouvernement n\'aura pas les moyens de financer sa coûteuse politique sociale à laquelle il consacre plus de 13 milliards d\'euros par an pour maintenir la paix sociale et permettre au régime de se maintenir.Pas d\'amélioration du niveau de vieCet argent sert à subventionner les prix des produits de large consommation comme le lait, les céréales, les carburants, ainsi qu\'à faire fonctionner les hôpitaux, les universités et les écoles. Le gouvernement subventionne aussi à coups de centaines de millions d\'euros par an l\'électricité, l\'eau, le gaz, les médicaments ; sans oublier le financement de sa politique de lutte contre le chômage.Mais ces dépenses sociales n\'ont pas contribué à améliorer les conditions de vie des Algériens, en raison de la corruption - qui a permis l\'émergence de nouveaux riches - et de la contrebande des produits subventionnés vers les pays voisins. Le pays manque cruellement de loisirs, le pouvoir d\'achat reste très faible, le chômage est endémique et touche plus de 25 % des jeunes, la santé est sinistrée, l\'école est en crise, la consommation de drogue en forte hausse, les inégalités sociales accentuées. Cinquante ans après son indépendance, l\'Algérie donne l\'image d\'un pays à l\'abandon ! 
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