Les supermarchés, un pari risqué pour les laboratoires

En ce début octobre, le laboratoire McNeil, filiale de l'américain J&J, lance dans les supermarchés français un bain de bouche, Listerine. Une commercialisation légale car il ne s'agit pas d'un médicament mais d'un produit de parapharmacie. Pourtant, Listerine est déjà disponible à l'identique? en pharmacie, depuis 2005. « Nous voulions attendre d'avoir acquis notoriété avec la marque auprès des professionnels de santé (dentistes, chirurgiens, etc.) avant de la proposer en grande surface », justifie Sophie Jacq, responsable marketing chez McNeil France. Listerine sera vendu environ 10 % moins cher en grande surface mais les officines se verront proposer six références, contre trois pour la grande distribution.De nombreux labos jouent ainsi sur les deux tableaux. Ils sont surtout issus de l'agroalimentaire (Unilever, Procter, Colgate, etc.), mais des groupes « classiques » tels le britannique GSK suivent aussi le mouvement. En revanche, contrairement à McNeil, « les industriels différencient généralement les marques entre officine et grande surface, pour ne pas heurter la sensibilité des pharmaciens et par souci de lisibilité pour le client final », indique Patrick Biecheler, du cabinet Roland Berger.marges plus faiblesDe fait, jongler entre officines et grandes surfaces est indispensable mais périlleux. Pour une industrie peinant à trouver des relais de croissance, les supermarchés offrent des débouchés tentants et des synergies industrielles et de R&D. Avec Listerine, McNeil veut tripler, en trois ans, un marché des bains de bouche « sans AMM » (autorisation de mise sur le marché) chiffré à 35 millions d'euros en 2008. Et « pour les groupes déjà présents en grandes surfaces, l'officine confère une crédibilité aux produits sans AMM », explique Pascal Voisin, de l'institut IMS Health. Et c'est bien là que le bât blesse. Farouchement opposés à la légalisation de la vente de médicaments en supermarchés, les pharmaciens voient d'un mauvais ?il l'essor de produits parapharmaceutiques dans leurs officines. « Attention à la caution de la blouse blanche ! » s'inquiète Isabelle Adenot, présidente de l'Ordre des pharmaciens.Même en termes économiques, l'intérêt de la démarche doit être pesé. « En grandes surfaces, les volumes vendus peuvent être plus importants, mais les marges sont plus faibles, en raison du fort pouvoir de négociation des acheteurs. La distribution en pharmacie a tendance à être plus rentable en raison de prix plus élevés et de remises commerciales moins fortes », souligne Claude Allary, associé chez Bionest.
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