S'unir face à la Chine

Ce n'est pas par hasard si l'Europe enfin élève la voix sur le yuan, alors que la Chine maintient le cours dollar/yuan à 6,70 dollars quand le FMI retient une parité de pouvoir d'achat à 3,70 dollars... Le 29 septembre, la Chambre des représentants a donné au président des États-Unis le droit d'appliquer des droits de douane à l'encontre des pays qui sous-évaluent leur monnaie contre dollar, à commencer par la Chine. Et, pour la première fois depuis longtemps, elle a convenu que protectionnisme monétaire et protectionnisme douanier sont équivalents et substituables.Si, après les élections « mid-term », le Sénat rejoignait la Chambre, il faudrait encore que M. Obama valide leur démarche pour que la Chine subisse des sanctions douanières. Mais cela amènerait probablement l'OMC, qui ne sait condamner que le protectionnisme douanier et ne dispose d'aucune arme contre le protectionnisme monétaire, à punir les États-Unis. À ce jour, les pays qui triomphent sont donc les pays qui sous-évaluent fortement leur monnaie, bien que ce soit une redoutable arme commerciale, tout en respectant les règles douanières de l'OMC.Cette sous-évaluation explique le contraste, depuis 2001 et l'entrée de la Chine à l'OMC, entre une croissance, forte et robuste, en Chine et une croissance, faible et malsaine, dans les pays du G7. Elle explique aussi son opulence financière, qui lui permet aujourd'hui de mener à bien une stratégie de prédation?: après avoir acheté l'Afrique, elle accapare les ressources du Brésil et vient rôder autour d'une Grèce en désarroi pour tenter de s'emparer de son territoire et de ses actifs. Pendant ce temps, victimes de leur stagnation prolongée, les pays du G7 s'enfoncent dans la double spirale de la dette publique et de la dette extérieure.Or, entre mars et novembre 2009, la Chine a mené activement campagne contre le recours des États-Unis au « quantitative easing ». Elle a alors nettement signifié qu'elle sortait du dollar pour aller vers les autres devises convertibles et vers l'or, incitant les autres banques centrales émergentes à l'imiter. Résultat?? Baisse du dollar, hausse de l'euro et hausse de l'or. La Chine a alors fait coup double?: elle a administré la preuve de la vulnérabilité du dollar et de son statut de monnaie de réserve?; elle a accru sa compétitivité change?: en poussant les autres devises à la hausse contre dollar, elle les faisait monter aussi contre yuan (yuan qui, depuis juillet 2008, avait été « repeggé » au dollar).Après avoir interrompu le « quantitative easing » en mars 2010, la Fed se prépare à y revenir, ce qui conduit aujourd'hui à une hausse de l'or et à une nouvelle baisse du dollar (et du yuan) contre euro et autres devises convertibles. Le Brésil vient d'évoquer publiquement « le surgissement d'une véritable guerre des monnaies ». C'est bien la Chine qui, depuis 2009, en est l'instigatrice et la bénéficiaire?; l'Europe, le Japon et quelques grands pays émergents en sont les principales victimes désignées.Au moment où les États-Unis commencent à se rebiffer, le temps est venu pour que ces pays se mobilisent eux aussi face à la Chine... La solution, c'est de reconstruire une OMC efficace, qui exclurait les pays qui n'acceptent pas des règles loyales en matière de change (et particulièrement ceux qui, comme la Chine, se refusent à instaurer la convertibilité définitive de leur monnaie). Elle pourrait protéger ses pays membres des pays qui s'en seraient exclus, en imposant à ces derniers des droits de douane très significatifs.Encore faudrait-il que les États-Unis donnent deux gages aux pays qui décident de résister à la Chine. Primo, que le Congrès neutralise le lobbying intérieur que poursuivent trop de grandes multinationales américaines en faveur du statu quo sur le yuan?; les États-Unis doivent redonner priorité à la croissance et à l'emploi dans leurs frontières plutôt qu'à la seule maximisation des marges et des bonus.Secundo, il faut surtout que Démocrates et Républicains pratiquent l'union sacrée. En 1942, celle-ci avait prévalu face à la menace militaire de l'Allemagne et du Japon?; en 2010, elle doit prévaloir à nouveau face à la guerre économique, déstabilisatrice et mortifère, que leur livre la Chine depuis 2001. Américains, Européens, Japonais, Émergents, unissons-nous. C'est la santé et l'avenir du monde démocratique qui dépendent de la vigueur et de la cohésion de votre réaction face à la Chine.
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