Avoir une stratégie flexible sur les risques climatiques

Que la Conférence internationale de Copenhague sur le climat accouche ou non d'une souris, les entreprises doivent continuer à se préparer aux risques climatiques, en particulier au réchauffement annoncé de la Terre. Comment ? Pour certains experts, il est nécessaire qu'elles intègrent dans leur culture quotidienne le réflexe de la résilience : avoir une prévention ou préparation robuste, en dépit de chiffres manquants encore de fiabilité sur les changements climatiques à long terme. «?Une organisation résiliente est la capacité de l'organisation d'une entreprise à supporter un ou des impacts de choc majeur ou de se préparer à les éviter pour poursuivre sa mission », expliquait jeudi dernier Bernard Sinclair-Descagné, enseignant de HEC Montréal et École polytechnique, membre de la chaire Développement durable d'EDF, lors d'une conférence Risk organisée par OTC Conseil, en partenariat avec l'Institut de recherche de la Caisse des dépôts et consignations et l'université Paris Ouest Nanterre-La Défense.l'atout résilienceCette résilience peut et doit aider les entreprises à prendre un virage stratégique au bon moment. Un exemple ? Créé au début du XIXe siècle, le groupe DuPont fabrique de la poudre à canon. En 1920, il change d'activité en se lançant dans les polymères (Néoprène, Teflon, Kevlar, Lycra, etc.). Puis, nouveau tournant en 1999, le groupe entreprise délaisse les polymères pour aller vers l'agro-biotech. Ces différents virages pris s'expliquent par une forte culture scientifique en interne. Sans peut-être vraiment le savoir, DuPont avait déjà intégré la résilience afin de se préparer à de tels changements. Les futures évolutions climatiques ne doivent pas non plus être occultées pour la survie d'une entreprise. D'autant que « le climat est devenu un bien public, d'où la nécessité de le financer », souligne Gilles Rotillon, professeur de sciences économiques à l'université Paris Ouest Nanterre-La Défense, spécialiste de l'économie de l'environnement. Les entreprises doivent donc s'attendre à de nouvelles mesures fiscales, législatives et réglementaires dans les années à venir. Or « les entreprises ne sont pas les moteurs des transformations majeures des modes de production », estime cet universitaire. Un tort, sans doute, car les sociétés intégrant dans leur politique stratégique les changements climatiques ont une meilleure chance d'être toujours en activité à moyen, voire à long terme. Pour Stéphane Hallegatte, chercheur chez Météo France, l'objectif consiste à avoir des flexibilités dans les stratégies et non pas à les supporter comme des coûts. « Les personnes du monde de l'entreprise gèrent au quotidien des incertitudes. On leur demande d'en gérer une de plus : le climat », souligne ce chercheur.ordonner les prioritésPourtant, les entreprises doivent dès à présent intégrer les changements climatiques connus en particulier dans l'Hexagone. En 2070, le climat à Paris sera celui que connaît aujourd'hui le sud de l'Espagne. Et « la canicule de 2003 deviendra la fraîcheur en 2080 », prévient Stéphane Hallegatte. En 2060, un été sur deux sera plus chaud que celui de 2003? Les entreprises peuvent donc déjà penser à construire leurs nouveaux bâtiments à des normes adaptées aux évolutions climatiques annoncées. D'autant que les plans d'occupation des sols (POS) risquent de devenir plus restrictifs. La prévisibilité pour l'urbanisme varie entre 25 ans et 200 ans. Pour les infrastructures de transport, elle serait de 50 ans à 200 ans. La gestion de l'eau va également se poser pour les industriels. La prévisibilité serait jusqu'à 200 ans. Reste qu'il est très difficile de connaître encore avec précision les futures variations des précipitations.À n'en pas douter, le réflexe de la résilience va monter en puissance au cours des prochaines années. Car « cela permet de fixer des priorités », insiste Stéphane Hallegatte. L'analyse traditionnelle coût-bénéfice n'est qu'une méthode de décision. Elle n'offre pas une mise en perspective à moyen et long terme. Les entreprises qui se contenteront de cette seule approche restrictive risquent de disparaître.Frédéric Hasting
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