Une proposition de travail détaillée peut devenir une promesse d'embauche

Pour lancer un recrutement, une entreprise ne peut pas faire n'importe quoi. Si elle détaille trop sa proposition d'emploi et l'adresse par courrier à un candidat de façon nominative, elle s'engage en réalité pour une promesse d'embauche. Or une telle promesse équivaut à un contrat de travail. Dans un arrêt du 15 décembre 2010, la chambre sociale de la Cour de cassation l'a clairement dit. « Constitue une promesse d'embauche valant contrat de travail l'écrit qui précise l'emploi proposé et la date d'entrée en fonctions », a considéré la haute juridiction.Indemnités et dommagesL'enjeu est loin d'être négligeable. Car une entreprise aura une mauvaise surprise si elle revient sur sa proposition de recrutement. En effet, le bénéficiaire de la promesse d'embauche l'attaquera en justice pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et aura ainsi de fortes chances d'obtenir des dommages et intérêts et le versement d'une indemnité de préavis. C'est exactement ce qui s'est passé dans l'affaire jugée par la Cour de cassation.Concrètement, par lettre datée du 31 juillet 2006, la société Compagnie Antillaise de Matériel Automobile (Cama) avait proposé à une personne de l'engager, au plus tard à compter du 1er octobre 2006, en qualité de directeur adjoint. La rémunération mensuelle devait être de 7.600 euros sur treize mois. Cette personne devait bénéficier également d'un véhicule de service ainsi que de la prise en charge de ses frais de déménagement et de logement durant le premier mois de son installation en Guadeloupe. Seulement, dans un courrier en date du 9 août 2006, la société Cama lui a annoncé qu'elle avait décidé de ne pas donner suite à la promesse d'embauche. La personne a alors saisi la justice prud'homale pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.Devant les juges du fond, la société Cama a avancé notamment la mauvaise foi du bénéficiaire de la proposition d'emploi. Ce dernier aurait accepté l'offre tout en sachant que l'entreprise s'était rétractée. Dans un arrêt du 6 mai 2008, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion n'a pas retenu les arguments de la société Cama. Les juges du fond ont pris note de la lettre envoyée par cette entreprise au bénéficiaire de la proposition d'emploi. Dans ce courrier lui était proposé un contrat de travail ainsi que le salaire, la nature de l'emploi, les conditions de travail et la date de prise de fonctions. Pour la cour d'appel, cette proposition d'emploi était en réalité une promesse d'embauche. Et par conséquent, la personne a été licenciée. Les juges du fond ont condamné la société à verser 45.600 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 24.699,99 euros comme indemnité de préavis.Mécontente de la décision, la société Cama s'est pourvue en cassation. Dans son arrêt du 15 décembre 2010, la chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé en droit l'interprétation des juges du fond. Comme il s'agissait d'une promesse d'embauche, la rupture de l'engagement pris par l'entreprise doit s'analyser comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et il importe peu, pour la Cour de cassation, que la promesse d'embauche prévoit ou non une période d'essai. Car l'entreprise avait rompu le contrat de travail avant son commencement d'exécution.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.