Face à la crise grecque, Angela Merkel temporise

Avec la crise grecque, l'Europe redécouvre le style Merkel. Parfois déconcertant pour les Français, celui-ci est en réalité l'application d'une tactique d'une grande finesse. Soucieuse de sa popularité et des subtils équilibres de la politique allemande, la chancelière aime donner du temps au temps. Histoire de ménager les susceptibilités, de préparer le terrain, avant, enfin, d'agir. En ce sens, son attitude actuelle n'est pas sans rappeler celle de l'automne 2008, après la faillite de Lehman Brothers. Au début, elle avait fait chorus avec l'opinion publique, fustigeant l'avidité des financiers et refusant toute aide publique à de tels irresponsables. Mais cette colère était toujours accompagnée d'un rappel de son devoir de sauvegarder l'économie nationale d'un krach bancaire. Cet apparent double discours permettait en réalité de faire accepter progressivement à l'opinion l'idée d'un plan d'aide aux banques et de mettre la pression sur le secteur. Au bout de deux mois, les esprits étaient mûrs pour accepter l'inévitable : une aide publique aux banques dans les conditions fixées par le gouvernement. Angela Merkel avait pris le temps nécessaire afin que chacun reconnût que le juste milieu qu'elle incarnait représentait la seule issue possible. On comprend dès lors pourquoi le volontarisme démonstratif d'un Nicolas Sarkozy l'a exaspérée.l'opinion moins réticenteLe scénario se reproduit aujourd'hui avec la Grèce. Officiellement, Angela Merkel a joué la carte de la fermeté, refusant depuis plusieurs semaines toute idée d'aide à Athènes. Elle a donné ainsi des gages à son opinion publique et elle a aussi mis la pression sur la Grèce. Mais parallèlement, cette fermeté s'accompagnait toujours d'un rappel de la nécessité de la stabilité de l'euro. Progressivement, l'opinion allemande est donc devenue sensible à cet argument et est devenue moins réticente à l'idée d'une aide à la Grèce. Un récent sondage montre que 49 % des Allemands y restent opposés, contre plus de 70 % voici un mois. Le nouveau plan grec qu'elle a salué avec enthousiasme sera un argument de plus pour Angela Merkel lorsqu'il faudra aider Athènes. Mais comme toujours, tout se fera avec le temps, lorsque chacun ne pourra plus qu'accepter la voie tracée par la chancelière. Cette dernière n'agit d'ailleurs pas autrement en politique intérieure, par exemple sur la question des baisses d'impôts. Peu férue de l'attaque éclair, Angela Merkel a appris les leçons de Fabius Cunctator, le Temporisateur, le vainqueur d'Hannibal. Avec la même redoutable efficacité.
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