L'angoisse grimpe chez les acheteurs de blé

Il existe un baromètre de la panique sur les marchés des céréales : les volumes échangés. L'embargo décidé par la Russie sur les exportations de blé a entraîné une envolée des cours très violente jeudi dernier, avec une hausse de 7 % à Paris comme à Chicago, mais aussi une nouvelle explosion des volumes. À Paris, le nombre de contrats à terme échangés a atteint 73.000 lots, du jamais vu. Soit 10 % de la récolte française. Aux États-Unis, le CBOT a évoqué l'idée de relever le montant des dépôts imposés aux investisseurs sur le blé, histoire de calmer le jeu. Là aussi, les échanges ont bondi, revenant vers les niveaux de début 2008, au plus fort de la dernière crise des céréales. Le blé avait alors bondi au-delà de 12 dollars le boisseau, son plus-haut historique.Malgré l'envol de 54 % des cours sur les marchés européens et américains en un mois, dont les contrats à terme cotaient respectivement 209,5 euros et 755 dollars vendredi soir, un consensus se dessine autour de perspectives haussières jusqu'en octobre. Car les perspectives de récolte 2011 sont déjà remises en question. « Le blé d'hiver se sème vers octobre, il y a peu de chances que les terres brûlées puissent être emblavées dans si peu de temps », estime Jérôme Sauvegrain, expert chez Céréalis.Selon le FMI, les restrictions aux échanges représentent avec le prix de l'énergie les principaux motifs de hausse des prix des céréales. En 2007, l'envolée des cours avait été enclenchée par des taxes à l'exportation en Argentine, en Chine, au Kazakhstan, en Russie et en Ukraine. Or le Kazakhstan et la Biélorussie, qui font partie d'une union douanière avec la Russie, devraient prendre des mesures similaires. Faute de quoi l'embargo russe aurait peu de sens : les blés kazakhs doivent traverser la Russie pour rejoindre la mer Noire avant de partir à l'export. Le gouvernement ukrainien serait également tenté par des mesures de restriction. Selon un expert, des trains chargés de blé auraient déjà été bloqués dans le pays ces dernières semaines sous prétexte de contrôles sanitaires. La région de la mer Noire est en ébullition. Des embouteillages de camions chargés de céréales bloquent depuis deux jours les alentours de Novorossisk, principal port russe d'exportation, alors que les exportateurs tentent de sortir du blé du pays avant l'embargo. Pour de nombreux acheteurs, le blé à 230 euros est toutefois déjà trop cher. « Vu le niveau de prix, nos acheteurs africains ne font plus rien, ils attendent » assure un intermédiaire. Certains pays s'inquiètent pour leur approvisionnement, à l'instar de l'Égypte, premier acheteur au monde. Le pays vient de reconsidérer son cahier des charges afin de pouvoir acheter du blé en France. L'établissement public égyptien à la tête des achats de céréales imposait jusqu'alors des chargements de 60.000 tonnes qui ne peuvent être réalisés à Rouen, premier port de blé français, en raison du manque de tirant d'eau de la Seine ; il vient de renoncer à cet impératif.
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