Amsterdam fait la part belle aux Modernes

Madame Matisse accueille le visiteur, veillée par un fier Rifain en djellaba émeraude, peint par son mari, alors que résonne non loin la magistrale « Composition VI » de Kandinsky. Mais Van Dongen et Picasso ne l'entendent pas de cette oreille. À la femme au foyer, ici représentée dans un intérieur au rouge éclatant, le premier oppose une femme fatale coiffée d'un large chapeau noir. L'Ibère leur préfère une puissante dryade dont les formes empruntent à la sculpture africaine.Bienvenue au musée de l'Hermitage d'Amsterdam pour une ronde ensorcelante de chefs-d'oeuvre signés des plus grands maîtres de l'art moderne. L'occasion d'une éblouissante exposition rassemblant une centaine de pièces maîtresses empruntées à la maison mère, le musée de l'Hermitage de Saint-Pétersbourg. Regroupées par artistes, elles donnent à voir les audaces les plus folles des avant-gardes du début du XXe siècle. Celles d'un Matisse qui accentue dès 1901 la couleur du jardin du Luxembourg avec des arbres roses et violets, refusant ainsi que la peinture soit une fenêtre ouverte sur la réalité. Il y a aussi Picasso qui multiplie les points de vue dans ses compositions géométriques. Sans oublier Kandinsky et Malevitch, qui inventent un langage abstrait. Mais il y a aussi d'autres artistes que l'Histoire a laissés sur le bas-côté des sentiers de l'art et que l'on redécouvre ici. Comme le pacifiste Henri Le Fauconnier (1881-1946) qui, en pleine bataille de la Marne (1915), dresse le portrait d'un ouvrier happé par un ciel sanglant alors qu'un train vient le chercher. Sans oublier Louis Valtat (1869-1952). Avant même l'avènement du fauvisme, ce dernier osait des falaises violettes sous un ciel laiteux, léchées par une mer moutonnante. Non contente de dévoiler autant d'oeuvres majeures, cette exposition rend aussi hommage à deux collectionneurs russes exceptionnels, Chtoukine et Morozov. Les premiers à avoir acquis ces tableaux avant qu'ils ne soient nationalisés au lendemain de la révolution bolchevique. On ne sait vraiment ce qui avait amené ces deux industriels du textile aux avant-gardes. Chtoukine avait rencontré Matisse en 1906, devenant très vite son mécène. Quatre ans plus tard, il se tourne vers Picasso et lui achète 37 tableaux. Moins radical, Morozov assemblait sa collection de manière plus didactique, comme s'il souhaitait retracer la carrière d'un artiste à travers ses achats. Cela lui a porté chance. Lorsque sa maison a été transformée en musée en 1918, il a été autorisé à en assurer la direction, tandis que Chtoukine partait en exil, laissant derrière lui ses trésors.Yasmine YoussiLe musée de l'Hermitage présente une ensorcelante exposition rassemblant les plus grands chefs-d'oeuvre de l'art moderne.
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