Obama va refermer la boucle financière à Wall Street

« I did not run for office to be helping out of fat-cat bankers on Wall Street. » (Je n'ai pas été élu pour aider les géants de Wall Street). Le 14 décembre dernier, lors du sommet des douze principaux dirigeants de mastodontes bancaires américains, Barack Obama a sommé les financiers de s'expliquer sur le niveau particulièrement bas des crédits aux États-Unis. Lors de ce séminaire, les banquiers n'ont montré apparemment aucune réticence à respecter les nouvelles exigences en capital qui sont celles de l'administration Obama, alors même que les banques doivent pourtant dans un premier temps rembourser le plan Tarp.L'objectif affiché par la réforme Obama est de s'attaquer aux fragilités structurelles du système financier américain. Pour ce faire, l'administration envisage la création d'un conseil de surveillance des services financiers pour suivre et évaluer les risques. Le gouvernement va également relever le niveau de capital que devront posséder toutes les institutions financières, avec pour certaines d'entre elles des obligations plus contraignantes et des modalités spécifiques pour le traitement des produits dérivés et des opérations de titrisation.Au-delà de la polémique sur la contraction du crédit, consécutive au renforcement des contraintes réglementaires, comment concilier ces nouvelles exigences de constitution de fonds propres avec le remboursement du plan Tarp?? Malgré l'apparente contradiction, il est tout à fait possible d'autofinancer un projet de cette envergure sans que les banques ne fassent d'effort particulier, tout en préservant l'exigence éthique de l'administration Obama sous la pression de l'opinion publique.Premier élément de la boucle financière cachée dans le plan de sauvetage de la finance américaine, les banques ont pu réaliser des augmentations de capital importantes grâce à l'argent du plan Tarp : Citigroup et Wells Fargo ont annoncé respectivement 20 et 25 milliards de dollars, financés par le biais de ce plan de sauvetage. Mais ce n'est pas tout. Le plus surprenant dans cette affaire n'est pas la manière dont les banques américaines vont rembourser le plan Tarp, sous forme d'émissions de dettes et d'actions, ni même l'idée ? pour le moins saugrenue ? que les contribuables pourraient renforcer la solvabilité du système bancaire (après avoir été pour le moins sollicités par la crise financière du subprime). Mais bien ce qui s'est passé juste après la réalisation des plans de sauvetage qui continuent à venir en aide au secteur bancaire. Sans revenir sur les causes et les coupables de cette crise, ces « bailouts », dont fait partie le plan Tarp, ont particulièrement déstabilisé la concurrence au sein du secteur bancaire en incitant à des regroupements et des fusions-acquisitions qui, comme chacun le sait, ont tendance à doper le capital des banques? Ces regroupements par absorption et mort définitive des petites banques ont aussi permis aux nouveaux mastodontes financiers fraîchement constitués de réaliser des profits colossaux de monopole. Une nouvelle aubaine pour ces banques, dont la rentabilité accrue leur permettra de rembourser les aides consenties par l'État et de respecter les nouvelles contraintes réglementaires?! Dans ce contexte, la proposition de la Maison-Blanche d'imposer une nouvelle taxe sur les profits des banques pour accélérer le remboursement du plan Tarp vise uniquement à rétablir l'éthique financière de l'administration Obama? Cela n'aurait presque rien d'exceptionnel si deux chercheurs américains n'avaient pas récemment observé le lien particulièrement étroit qui existe entre les leaders de ces banques mondiales et le monde politique (information révélée par Barry Ritholtz, commentateur très avisé du monde financier outre-Atlantique de la chaîne CNN)?: au moment de l'octroi des fonds, certains leaders bancaires étaient d'anciens sénateurs et d'autres d'anciens députés, ce qui aurait facilité l'obtention des fonds publics. Voilà comment une formidable boucle financière peut être ainsi refermée discrètement... Point de vue Pascal de Lima Économiste en chef à Altran Financial Service et enseignant à Sciences po.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.