Les multinationales en première ligne pour diffuser les normes sociales

Grande gagnante de la mondialisation au cours de la dernière décennie, la Chine a soumis ses partenaires commerciaux à une concurrence sans merci. Forte d'une main-d'oeuvre abondante et malléable, dépourvue de liberté syndicale, dotée d'une loi sur le travail minimaliste et n'ayant que tardivement pris conscience des effets environnementaux de son industrialisation à marche forcée, elle a fondé sa compétitivité internationale sur le dumping social et environnemental. Nombre d'entreprises des pays du Nord se sont implantées en Chine, qui s'est ainsi hissée au rang de premier exportateur mondial. Mais cette page est peut-être en train de se tourner. En s'engageant dans la voie de la hausse des salaires, Pékin ouvre une brèche dans son modèle low cost. D'autant que, l'an passé, Pékin a pris des engagements pour améliorer son efficacité énergétique et réduire ses émissions de gaz à effet de serre, ce qui pèsera aussi sur les coûts de production de son industrie. Lors de la Conférence ministérielle sur le commerce international de Seattle, en 1999, l'Europe et les Etats-Unis avaient tenté d'introduire dans le débat les normes sociales voire environnementales avec l'aval de tous les membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Mais de grands pays en développement (Chine, etc.) avaient bruyamment rejeté la proposition, interprétée comme le retour d'un protectionnisme déguisé.Aujourd'hui, « l'OMC n'a aucune compétence en matière de conditions de travail », explique Olivier Cattaneo, chercheur associé à Sciences po. Et la seule institution qui peut se prononcer sur ces questions (travail indécent, forcé, des enfants, etc.) est l'Organisation internationale du travail, mais elle n'a aucun poids face à des Etats de la taille de la Chine. « Le monde est désarm頻, estime Olivier Cattaneo. Pour essayer de surmonter le handicap concurrentiel, l'Europe a adopté un système de préférence (SPG) qui prévoit un accès privilégié à son marché pour les exportations de pays qui appliquent certaines régles en matière de conditions de travail ou environnementales.Une « saine émulation »Mais au bout du compte, « ce sont surtout les multinationales qui permettent la diffusion de ces normes », estime Olivier Cattaneo, « car elles subissent la pression de leur opinion publique dans les pays du Nord et peuvent exiger de leur chaîne de fournisseurs de respecter certains standards ». Nike, Nestlé, Unilever, Apple, GE et autres grandes enseignes ont signé ou signent des chartes de « responsabilité sociale des entreprises », par lesquelles elles s'engagent notamment à choisir leurs fournisseurs, y compris sur des critères sociaux et environnementaux, au Sud. « Une saine émulation peut alors devenir possible entre les entreprises », estime Olivier Cattanéo. Il y a quelques mois, l'ancien responsable de Walmart en Chine, Lee Scott, a affirmé que, d'ici à 2012, son groupe compte exiger de ses fournisseurs qu'ils s'approvisionnent auprès des fabricants les mieux classés sur le plan social et environnemental. Mais comme toujours, tout repose sur la qualité et le sérieux des audits qui établissent ces classements. Laurent Chemineau
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