La timide relance de l'industrie nucléaire mondiale face à un nouveau coup de frein

« Jusqu'à présent, les trois réacteurs de la centrale de Fukushima ont résisté. Mais ce n'est pas forcément ce que le public en retiendra. Il demeure que nous devons prendre en compte l'aspect émotionnel auquel les dirigeants politiques seront, eux, sensibles », déclare Yves Brachet, vice-président Europe Moyen-Orient de Westinghouse. Cela ne s'est pas fait attendre. Angela Merkel a annoncé lundi un moratoire de trois mois sur l'allongement de la durée de vie des réacteurs qui venait tout juste d'être décidé (voir ci-contre). Dans le même temps, la Suisse a suspendu ses projets de renouvellement de centrales nucléaires. La Belgique, de son côté, a indiqué que ce qui se passait au Japon allait « influencer » le débat sur les centrales belges. La Belgique n'a toujours pas confirmé l'accord intervenu en 2009 avec Electrabel (GDF Suez) pour prolonger de dix ans trois réacteurs.Ce coup de frein intervient au moment où la construction de nouvelles centrales nucléaires redémarrait doucement, après trente ans de gel à la suite des accidents de Three Mile Island (1979) et de Tchernobyl (1986). Fin 2009, 21 chantiers de réacteurs ont certes démarré dans le monde, un record inégalé depuis 1985, mais tous, sauf celui de Flamanville en France, ont été lancés en Chine (15), en Corée et en Russie. Aux États-Unis et en Europe, la crise financière et l'effondrement des prix de l'électricité ont retardé la plupart des projets qui commençaient à être réinitiés.Nul ne peut prédire l'ampleur du ralentissement qui va interrompre encore cette relance. « Une certitude, cet accident va annuler une partie du rebond qui était attendu », affirme un analyste parisien. Autre certitude : une hausse des coûts du nucléaire est à prévoir. « Dans certains pays, les autorisations d'extension de durée de vie pourraient être plus difficiles à obtenir, et les autorités de sûreté pourraient revoir à la hausse leurs exigences, ce qui renchérirait les coûts de maintenance et de construction », affirme Emmanuel Turpin, chez Morgan Stanley.À plus long terme, constructeurs et exploitants nucléaires restent confiants. « Cet accident ne va pas remettre en cause le nucléaire existant qui génère 15 % de l'électricité produite dans le monde. Cela ne se remplace pas facilement », estime un autre analyste. « Mais surtout, comment répondre, sans le nucléaire, aux besoins de la planète de deux fois plus d'énergie d'ici à 2030 avec deux fois moins de CO2 ? » souligne un industriel. La réaction du gouvernement polonais, qui a annoncé lundi que la Pologne maintenait ses projets de nouvelles centrales à partir de 2020, devrait les conforter. Marie-Caroline Lopez
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