La Rhur espère une vie après l'industrie...

En sortant de la gare principale d'Essen, il est difficile de rater la tour RWE . Bâtiment de verre ultramoderne, le siège social du fournisseur d'énergie est la preuve que la Ruhr est désormais une région de services. La part des employés dans le tertiaire dans la région atteint désormais 71 %, contre 40 % voici quarante ans. Essen est d'ailleurs un haut lieu du secteur de la distribution en Allemagne. On y trouve le siège de Karstadt, actuellement en faillite, mais aussi celui d'Aldi, devenu un géant mondial du hard discount, dont le premier magasin a ouvert, voici un demi-siècle dans la banlieue de la capitale européenne de la culture. Premier port fluvial La région est également un important centre de recherche outre-Rhin, avec deux universités, Essen-Duisbourg et Bochum. Certes, comme le souligne Uwe Neumann, chercheur à l'institut RWI d'Essen, « la Ruhr demeure une grande région industrielle, y compris au niveau européen ». Mais plus que les quatre mines de charbon encore en activité, c'est bien plutôt la logistique et le transport qui tire aujourd'hui la région, notamment en raison de l'excellent maillage de la région, que ce soit en voies fluviales, ferroviaires, routières et aériennes. Duisbourg est d'ailleurs, à l'embouchure de la rivière Ruhr et du Rhin, le premier port fluvial d'Europe. Il reste également encore de grands centres sidérurgiques, mais, au final, la proportion d'actifs travaillant dans l'industrie est plus faible dans la Ruhr que dans le reste du Land de Rhénanie du Nord Westphalie. Restructuration tardiveLa restructuration minière et métallurgique a été plus tardive que dans les bassins britanniques ou français, compétitivité oblige. Mais il a bien fallu s'adapter, fermer les puits et licencier. La région a alors souffert. A cela s'est ajoutée la réunification et un certain délaissement de la part des autorités fédérales et européennes qui ont tourné leurs efforts vers l'Est. On comprend que les habitants de la Ruhr soit si fiers du chemin parcouru au prix de leurs efforts. Car, résume Uwe Neumann, la « reconversion de la région est plutôt une réussite, celle-ci n'est pas ? loin s'en faut ? un désert économique ». Mais toutes les plaies ne sont pas refermées. Pendant la reconversion, la main d'oeuvre la plus qualifiée de l'industrie a migré vers les régions industrielles les plus dynamiques, le Bade Wurtemberg ou la Bavière. Sont restés les moins qualifiés et les plus âgés. Du coup persiste un taux de chômage endémique de 12,2 % dans la Ruhr, soit 4,5 points de plus que la moyenne allemande. C'est un chiffre qui est supérieur à la moyenne des Länder de l'ex-RDA et dans certaines communes, comme Gelsenkirchen, le taux de chômage dépasse les 16 %. Démographie vieillissante« Il existe une fracture nette entre le Nord qui est encore très marqué par son passé minier et le sud, plus orienté vers les services », constate Uwe Neumann. Mais la Ruhr demeure une région pauvre et peu attirante. Le marché de l'immobilier y est désespérément déprimé. « Le problème démographique est alarmant », s'inquiète Uwe Neumann. La région est plus vieillissante que le reste du pays et le solde migratoire y est défavorable. Les jeunes quittent la région en quête d'emplois. Ceux qui réussissent la quittent, notamment les jeunes d'origine turque qualifiés qui se tournent vers une Turquie bien plus attirante par son dynamisme. Les projections sont inquiétantes : en vingt ans, Gelsenkirchen pourrait perdre 13 % de sa population, Essen 11 %, Duisbourg 10 %. En tout, le recul pourrait atteindre 5,5 %. Montée du tourismePour retrouver son dynamisme, la région doit donc redevenir attractive, et l'on comprend l'enjeu de la capitale européenne de la culture pour l'économie locale. D'autant que le tourisme, qui emploie 15 % des actifs, est une force montante dans la Ruhr : le nombre de nuitées y a progressé de 50 % en vingt ans, quand il restait stable dans le reste du Land. Mais l'essentiel est peut-être ailleurs. A la différence des autres régions industrielles d'Allemagne, la Ruhr manque d'un réseau de PME. « Le paysage économique est encore marqué par les grands groupes », constate Uwe Neumann qui déplore le peu d'entrain des habitants à créer des entreprises. Selon lui, sans ces créations de PME, l'emploi ne pourra repartir de manière durable dans la région. Mais pour cela, il faut également pouvoir attirer une population plus jeune et plus volontaire. Pouvoir attirer est donc vital pour la Ruhr. « En détruisant les clichés, Ruhr 2010 peut aider au développement et à l'attractivité de la région », espère finalement Uwe Neumann.
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