Villepin

Il rêve de l'Élysée et de l'Académie française. Mais en attendant, il se retrouvera, lundi, devant la 11e chambre du tribunal correctionnel de Paris pour son rôle dans l'affaire Clearstream. De cette épreuve, Dominique Galouzeau de Villepin, qui fêtera ses 56 ans le 14 novembre prochain, se dit certain de sortir lavé de tout soupçon. Et, surtout, regonflé à bloc pour reprendre son combat politique « pour la France » ? une figure de style pour ne pas dire « contre Nicolas Sarkozy ».D'ailleurs, le dernier Premier ministre de Jacques Chirac, aujourd'hui avocat international (numéro de toque C1203) n'a pas l'intention de rester cloîtré dans ses petits bureaux de l'avenue Foch en attendant le jugement du tribunal, lequel n'interviendra pas avant la fin décembre. Dès les audiences achevées, vers le 20 octobre, le politique-écrivain-poète-et-avocat compte à nouveau occuper le terrain. Ses proches sont donc chargés de lui monter plusieurs conférences dans des universités de province, qui seront autant de prétextes à des reprises de contacts médiatiques. Il devrait également répondre à « l'invitation pressante » de ses amis députés pour intervenir à l'Assemblée à l'occasion d'un colloque, comme il l'avait déjà fait au printemps sur l'Otan et l'Europe. Depuis ce mardi, le site de son nouveau club politique (www.clubvillepin.fr) permet à ses supporters de lui apporter leur soutien financier et d'utiliser l'espace communautaire mis à leur disposition. Avant ce lancement, Villepin avait rencontré les jeunes blogueurs qui, sur le Net, se revendiquent villepinistes pour les encourager. « On s'est inspiré de ce qu'a fait Obama pendant sa campagne », lance la présidente du club, Brigitte Girardin, ancienne ministre de la Coopération dans le gouvernement Villepin. Depuis le lancement du club, le 18 juin ? une date qui ne doit rien au hasard ?, un millier de supporters se seraient déjà manifestés, et près de 500 auraient envoyé un chèque d'adhésion, 10 euros pour les étudiants et les chômeurs, 100 et plus pour les bienfaiteurs. « On trouve toutes les catégories sans exclusive, y compris des Français de la diversit頻, s'enthousiasme Brigitte Girardin. Elle relève par exemple plusieurs artistes peintres, des étudiants, des déçus de Bayrou, un prof de maths qui avait adhéré à Désirs d'avenir, l'association de Ségolène Royal? Mais, pour l'heure, le Club Villepin tient plus de l'amicale que du parti politique. Un secrétaire général, un trésorier et une assistante, tous trois bénévoles, une photocopieuse neuve se partagent un petit sous-sol en plein c?ur du Marais, « généreusement prêté par un bienfaiteur », dixit Brigitte Girardin, en attendant de trouver des locaux plus proches de l'Assemblée. Voilà en tout et pour tout la puissance de feu des villepinistes. Mais ceux-ci ne comptent pas en rester là. Dans les prochaines semaines, les adhérents du club pourront rejoindre l'un des six groupes de travail qui vont être mis en place pour discuter politique et institutions, économie et finances, questions sociales, international et défense, culture? Des hauts fonctionnaires et des cadres d'entreprise devraient également les rejoindre. L'objectif est clair : fournir des argumentaires et des propositions. Enfin, le Club Villepin devrait bientôt se doter de comités locaux, si possible un dans chaque département. « On va essayer de trouver des profils nouveaux pour les diriger », insiste Brigitte Girardin. C'est Jean-Pierre Grand, le volcanique député UMP de l'Hérault, qui est à la man?uvre pour monter ces comités qui devront relayer les idées du chef et préparer ses déplacements dans leur département.Jean-Pierre Grand fait partie de la dizaine de parlementaires UMP qui n'hésitent pas à revendiquer son villepinisme. Il retrouve l'ancien Premier ministre chaque mercredi matin avenue Foch pour un tour d'horizon de l'actualité politique. À leurs côtés, le député de la Drôme, Hervé Mariton, qui fut quelques semaines en charge de l'outre-mer dans le gouvernement Villepin, François Goulard, ancien ministre de l'Enseignement supérieur dans ce même gouvernement, aujourd'hui député du Morbihan, Marie-Anne Montchamp, ex-secrétaire d'État aux Handicapés, élue du Val-de-Marne, ou encore Jacques Le Guen, député du Finistère. Une petite troupe hétéroclite de gaullistes historiques, de chiraquiens nostalgiques et? de libéraux orphelins d'un leader charismatique. Ce qui visiblement ne gêne personne. « Villepin n'est pas libéral, mais il n'a jamais dit qu'il était antilibéral », lance Hervé Mariton. « Les députés de la majorité ont été balladuriens, chiraquiens, et aujourd'hui sarkozystes, alors pourquoi pas un jour villepinistes », ironise François Goulard, qui fut un proche d'Alain Madelin. « En fait, Villepin constitue le point de ralliement des plus critiques à la politique actuelle », concède-t-il. Dire effectivement que la politique de Nicolas Sarkozy ne trouve pas grâce aux yeux de Villepin est un euphémisme. L'ancien Premier ministre ne manque pas de le faire savoir. En juin, juste après le remaniement ministériel, il étale sa déception : « J'avais souhaité, espéré que nous serions au véritable acte II de ce quinquennat, au deuxième souffle, et j'ai le sentiment malheureusement que nous risquons de perdre l'année 2009-2010. » Fin juillet, dans une interview au « Parisien », le diplomate se fait procureur pour juger qu'il n'y a pas l'ombre d'un résultat dans l'action gouvernementale en dénonçant pêle-mêle la réforme des heures supplémentaires, faite à contretemps, celle des régimes spéciaux de retraite, trop coûteuse, le bouclier fiscal, qu'il faut geler, ou le futur grand emprunt, qui peut se révéler « un piège ». Dans « L'Express » du 13 septembre, il récidive en dénonçant, cette fois, l'engagement militaire français en Afghanistan. Surtout, il s'en prend aux « dérives de l'hyper­présidence ou une réforme chasse l'autre, dans l'urgence et sous le coup de l'émotion ». « Pourquoi vouloir réformer à tout prix si c'est pour diviser les Français ? » s'emporte-t-il. Tout juste concède-t-il aujourd'hui un bon point au président de la République sur la création de la taxe carbone.Mais « l'antisarkozysme ne peut servir de programme ». Cette phrase prononcée fin août à La Rochelle par Martine Aubry à l'adresse de ses amis socialistes pourrait s'appliquer aussi bien à Villepin. Défendre avec grandiloquence les valeurs républicaines, ou célébrer l'indépendance nationale avec des accents lyriques comme il l'avait fait en 2003 dans son célèbre discours à l'ONU, ne peut faire fonction de programme présidentiel. Or, Villepin ne s'en cache pas : si les circonstances sont réunies, il sera candidat à l'Élysée en 2012, la seule élection qu'il estime à sa hauteur, pour offrir une « alternative à droite », comme il dit. Fin 2006, alors à Matignon, il avait déjà envisagé l'hypothèse, mais Sarkozy était parti le premier. Les circonstances qui lui permettraient de prendre sa revanche dans trois ans ? Un désaveu de Nicolas Sarkozy par l'opinion, un éclatement de l'UMP, un discrédit de François Bayrou, une gauche hors jeu? « La voix que je fais entendre sera de plus en plus forte », clame-t-il. Au point d'étouffer celle de Nicolas Sarkozy ? nVillepin s'en prend aux « dérives de l'hyperprésidence ou une réforme chasse l'autre, dans l'urgence et sous le coup de l'émotion ».
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