La « liste Woerth » provoque un clash avec la Suisse

L'annonce, fin août, par Éric Woerth, que la France disposait d'une liste de 3.000 noms de Français possédant des comptes non déclarés en Suisse devait inciter les fraudeurs à régulariser leur situation avant le 31 décembre. Elle débouche finalement sur une crise diplomatique entre Paris et Berne et la remise en cause de l'un des principaux acquis de la lutte contre les paradis fiscaux depuis le G20 de Londres.« La Suisse va suspendre le processus visant à ratifier [?] la nouvelle convention de double imposition avec la France », a lancé mercredi le ministre des Finances helvète, Hans-Rudolf Merz. Cette convention, signée fin août par la ministre de l'Économie Christine Lagarde et son homologue suisse, devait permettre à la France, une fois ratifiée par les deux chambres, de demander des informations aux autorités helvètes sur des contribuables français soupçonnés d'évasion fiscale.Mais les autorités suisses et les milieux bancaires ne décolèrent plus depuis qu'ils ont appris qu'une partie de la « liste des 3.000 » avait été alimentée par des données dérobées par un ancien informaticien de HSBC. Tout commence au début de l'année lorsque la justice suisse saisit le procureur de Nice, Éric de Montgolfier, pour qu'il interpelle Hervé Falciani, un informaticien de 39 ans qui a piraté des données confidentielles de la banque HSBC Genève.L'informaticien est interpellé puis relâché. Son ordinateur portable est saisi. C'est une véritable caverne d'Ali Baba puisqu'il contient 130.000 noms. Le procureur Éric de Mongolfier ouvre une enquête préliminaire pour des faits de blanchiment et transmet les données s'apparentant à de l'évasion fiscale au fisc français. C'est ici que le bât blesse. « La France n'a pas le droit d'utiliser des informations transmises dans le cadre d'une procédure pénale pour engager des poursuites fiscales contre des contribuables français », s'emporte l'ancien magistrat Bernard Bertossa.Protestation« Les informations transmises par l'informaticien de HSBC sont couvertes par le secret bancaire et ne pouvaient donc être utilisées sans l'accord des autorités suisses », poursuit Robert Zimmermann, juge à Lausanne. En utilisant ces données pour constituer la liste des 3.000 évadés fiscaux, la France a, selon le juriste, violé la convention d'entraide judiciaire entre les deux pays.La ministre suisse de la Justice, Eveline Widmer-Schlumpfne, a indiqué qu'une note de protestation va être officiellement envoyée à la France. Elle n'a toujours pas obtenu de réponse à sa demande d'entraide judiciaire. La Suisse a le sentiment d'avoir été dupée. Lors de la signature de la convention fin août par Christine Lagarde et Hans-Rudolf Merz, la France était clairement « au courant », s'est indigné le ministre des Finances suisse.
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