Le protectionnisme s'invite dans la campagne électorale américaine

« Les hommes et les femmes qui défendent notre pays devraient se battre avec des avions fabriqués aux États-Unis. » Patty Murray, sénatrice de l'État de Washington, ne s'en cache pas : le contrat géant des ravitailleurs de l'US Air Force doit être attribué à Boeing, et non à son concurrent européen Airbus. « Il faut créer des emplois aux États-Unis, pas en France », peut-on encore entendre dans l'un de ses nombreux clips publicitaires consacrés à ce sujet sensible.L'avionneur américain emploie plus de 70.000 personnes dans la région de Seattle. C'est donc un excellent thème de campagne électorale. Il suffit d'ailleurs de s'installer devant sa télévision pour se rendre compte que les tentatives protectionnistes se sont invitées dans le débat politique. Car il trouve un écho important auprès de l'opinion publique, dans un contexte de chômage de masse et d'émergence de la Chine. Après le Japon dans les années 1980, le Mexique lors de la décennie suivante : à chaque époque sa cible.Ces derniers jours, la « menace » chinoise a fait un retour fracassant sur le devant de la scène. Le « New York Times » a recensé, en une seule semaine, pas moins de 29 candidats accusant directement leur adversaire d'avoir été trop laxiste envers la Chine et d'avoir ainsi contribué aux délocalisations. À commencer par Harry Reid, le chef de la majorité démocrate au Sénat, qui a qualifié son opposante de « meilleure amie des travailleurs étrangers ». Ces attaques interviennent dans un contexte de tensions extrêmes entre les deux pays sur la sous-évaluation du yuan. Au début du mois, la Chambre des représentants a adopté, à une très large majorité, un projet de loi ouvrant la voie à l'instauration de droits de douane sur les produits en provenance de Chine. Pour ne pas souffler sur les braises, le Trésor américain a décidé vendredi dernier de reporter la publication de son rapport semestriel sur les changes, qui ne sera dévoilé qu'après les élections et le sommet du G20 prévu les 11 et 12 novembre.« Buy american » « Le protectionnisme rend les peuples plus pauvres, les nations plus hostiles et réduit les opportunités pour les entreprises et les travailleurs », déclarait récemment Larry Summers, le principal conseiller économique de Barack Obama. Le plan de relance américain de 787 milliards de dollars, voté début 2009, instaure pourtant un « buy american » pour tous les projets d'infrastructures qu'il doit financer. Sans oublier que les accords de libre-échange avec la Corée du Sud, la Colombie et le Panama attendent toujours d'être ratifiés par le Congrès, se heurtant aux réticences de la majorité démocrate. Des accords qui profiteraient pourtant aux grandes entreprises américaines. Mais ce n'est pas le genre de discours qui va mobiliser les électeurs.Jérôme Marin, à New York
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